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Le traitement comme méthode de prévention : la nouvelle frontière

Les ARV comme outil de prévention


Mexico, 7 août 2008 (Plusnews)

Dans leur quête, de plus en plus acharnée, d’une stratégie de prévention efficace contre le VIH  , les scientifiques espèrent que les médicaments antirétroviraux (ARV  ), normalement associés au traitement du virus, pourront apporter un élément de réponse.

« Nous sommes engagés dans une course désespérée contre la montre pour trouver une méthode de prévention qui fonctionne », a déclaré à la presse Stephen Lewis, l’ancien envoyé spécial des Nations Unies pour le sida   en Afrique, au cours de la Conférence internationale sur le sida  , à Mexico, mardi.

M. Lewis, actuellement codirecteur de AIDS-Free World, un organisme international de plaidoyer, a observé que pendant son mandat d’envoyé spécial des Nations Unies, il avait passé près de cinq mois à « supplier » les gouvernements africains de déployer les traitements, pour en faire bénéficier ceux qui en avaient besoin.

« Si j’avais pu dire [...] "non seulement les [ARV  ] permettent de maintenir les patients en vie, mais ils peuvent également réduire de manière significative les nouvelles infections", cela aurait été un argument de poids ».

Selon une étude récente du Centre for Excellence in HIV/AIDS de Colombie-Britannique, au Canada, traiter les personnes séropositives aux ARV   permet de réduire jusqu’à 60 pour cent le nombre des nouvelles infections au VIH  .

La théorie est la suivante : une concentration plus élevée de VIH   dans le sang (charge virale) augmente la probabilité de transmission. La thérapie ARV   réduit la charge virale dans le sang, ainsi que dans les sécrétions génitales, chez les hommes comme chez les femmes ; les personnes infectées par le VIH   peuvent alors devenir moins contagieuses.

Plusieurs études ont montré qu’au sein des couples hétérosexuels sérodiscordants (composés d’un partenaire séropositif et d’un partenaire séronégatif), les risques d’une transmission du virus au partenaire séronégatif étaient extrêmement faibles lorsque la charge virale du partenaire séropositif avait considérablement chuté, grâce au traitement.

Les chercheurs canadiens se sont servis d’un nouveau modèle mathématique pour déterminer si le traitement d’un plus grand nombre de personnes vivant avec le VIH   en Colombie-Britannique permettrait de réduire le nombre des nouveaux cas de VIH   dans la province canadienne.

Les résultats ont montré qu’en offrant à 75 pour cent des personnes séropositives ces médicaments susceptibles de prolonger leur vie, on pouvait réduire de 30 pour cent le nombre annuel de cas de VIH   en Colombie-Britannique ; si 100 pour cent des personnes séropositives recevaient ces médicaments, le nombre des nouveaux cas diminuerait de 60 pour cent.

« Nous savons depuis un certain temps que déployer la couverture des traitements ARV  , extrêmement actifs, permettrait de réduire le nombre des nouvelles infections [...] nous avons été stupéfiés par le nombre des nouvelles infections qui pourraient véritablement être évitées grâce à un déploiement de l’accès aux traitements », a déclaré le docteur Julio Montaner, qui dirige le Centre for Excellence in VIH  /SIDA   de Colombie-Britannique.

M. Montaner, qui a mené l’étude, a appelé à une poursuite des recherches, mais il a averti que le traitement à lui seul ne suffirait pas à prévenir les nouvelles infections au VIH   ; l’unique solution consisterait à conjuguer différentes interventions préventives.

Mardi, pendant sa présentation en séance plénière, Myron Cohen, chercheur à l’université de Caroline du Nord, a convenu qu’un certain nombre de questions restaient sans réponse sur le recours aux ARV   comme traitement préventif, et qu’il serait impossible de « mettre fin à l’épidémie par le seul biais des traitements ».

Le temps est venu de « marier » la prévention et le traitement du VIH  , a-t-il néanmoins déclaré aux délégués.

M. Cohen mène actuellement un essai clinique auprès de 1 750 couples sérodiscordants dans six pays, pour déterminer les conséquences d’un traitement précoce sur la transmission du VIH   aux partenaires séronégatifs.

Les résultats de l’essai, mené par le Réseau des essais dans le domaine de la prévention du VIH   de l’Institut national de lutte contre les maladies infectieuses et les allergies, ne seront probablement publiés que dans cinq ans ou plus.

Une pilule pour se protéger du virus ?

En attendant, des essais sur l’efficacité de la prophylaxie pré-exposition (PrEP  ) sont prévus ou déjà en cours dans différents pays d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et d’Amérique du Nord ; dans le cadre de ces essais, des ARV   sont administrés régulièrement à des personnes séronégatives exposées à un risque d’infection élevé.

Selon l’AIDS Vaccine Advocacy Coalition (AVAC) [Coalition en faveur des vaccins contre le sida  ], les essais sur la PrEP   feront intervenir davantage de participants que tous les essais sur les vaccins et les microbicides réunis.

« Bien que [l’efficacité de] la prophylaxie pré-exposition n’ait pas encore été prouvée par des recherches cliniques sur patients humains, elle est considérée comme l’une des interventions cliniques prometteuses actuellement en cours de développement dans la lutte contre le VIH   », a indiqué Mitchell Warren, directeur exécutif de l’AVAC, au début de cette semaine.

L’AVAC a publié un nouveau rapport au cours de la conférence, appelant les gouvernements, les bailleurs de fonds, les chercheurs et les activistes à déployer davantage d’efforts pour se préparer aux résultats initiaux des premiers essais sur la PrEP  , attendus dès 2009.

« Nous devrions anticiper, en envisageant toutes les issues possibles de ces essais, et élaborer de vraies stratégies destinées à faire en sorte que toutes les personnes susceptibles de profiter de la PrEP   puissent y avoir accès aussi rapidement et sûrement que possible, si celle-ci s’avère efficace », a exhorté Pedro Goicochea, chercheur, qui participe à une étude en cours sur la PrEP   au Pérou et en Equateur.

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Publié sur OSI Bouaké le samedi 9 août 2008

 

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