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« De mauvaises lois peuvent contribuer à la propagation du VIH »


Allez, commençons pour une fois l’histoire du jour par un gag pleinement réussi. Hier, les activistes d’Act Up se sont, en effet, beaucoup amusés. En début d’aprés midi, ils ont parcouru l’immense centre où se tient la conférence mondiale sur le sida  , accompagnés d’une foule de plus en plus massive de congressistes. Objectif ? « On cherche Sarkozy et Bachelot. Ils ont disparu », hurlaient-ils.

Avec des lampes de poche, ils regardaient dans les toilettes, dans les stands pour voir « où ils étaient cachés ». Un peu partout, ils distribuaient ou collaient une même affichette, l’une avec le visage de Nicolas Sarkozy, l’autre avec celui de Roselyne Bachelot. Pour celle ci, le texte était clair : « Missing Roselyne Bachelot, ministre française de la santé. Vue la dernière fois, le 3 août dans une salle de Bowling à Pekin ». Eclats de rires assurés. Le message, en tout cas, était univoque : « Comment se fait-il que pas un ministre français n’ait fait le déplacement à Mexico ? ». En tout cas, pas une journée de cette conférence ne se sera passé sans que ne soit mis en exergue cette absence.

Autre moment de la journée, celui là, plus grave : le témoignage d’Edwin Cameron, juge à la Cour supréme de Pétroria, en Afrique du Sud. L’homme est grand, élégant, et ... blanc. Lors de la conférence sur le sida   de Durban en juillet 2000, il avait laissé un souvenir saisissant. Il avait juste dit : « Je suis blanc, homosexuel, séropositif. Et je recois des traitements contre le sida  . En d’autres termes, dans mon pays, je suis une exception. C’est parce que je suis blanc et riche que je suis en vie ».

Depuis, cette haute personnalité de la magistrature sud-africaine s’est transformée en activiste redoutable pour l’accés aux traitements dans son pays. A Mexico, il est revenu pour participer à une session sur les législations qui apparaissent, de plus en plus, et qui visent à criminaliser la contamination du sida  .

Edwin Cameron est fatigué. Il s’essuie longuement le visage avec ses mains, mais il est resté d’une extrême élégance. « J’ai aujourd’hui une inquiétude forte », a-t-il dit. « Une vague législative est en train de se développer et de porter gravement atteinte aux efforts de lutte contre le sida  . C’est particulièrement sensible en Afrique. Certains gouvernements adoptent des lois, en pensant qu’ils peuvent légiférer contre l’épidémie du sida  . Mais ces lois peuvent faire bien plus de tort que de bien ». Et d’ajouter : « Tout comme des préservatifs défectueux ou comme des équipements médicaux non sécurisés, de mauvaises lois peuvent contribuer à la propagation du VIH  . Le droit pénal est tout simplement un mauvais cadre de référence pour répondre à la transmission du VIH  . Partout où il est mis à l’essai, il s’avére contreproductif et injuste ».

Peu aprés, une femme ougandaise, membre d’une association, a pris la parole. Elle a juste fait remarquer : « On fait des lois pour pénaliser la contamination. Et on ne fait rien contre la violence domestique, une violence qui est un facteur indirect de contamination ».

Ainsi se déroule cette conférence internationale. Entre le grave et le léger. Entre les absents et les présents. Une information encore, diffusée hier à Mexico : en Afrique subsharienne, 80% des enfants contaminés à leur naissance par le virus du sida   meurent dans les cinq premières années de leur vie.

Eric Favereau / Libération / jeudi 7 août 2008


Publié sur OSI Bouaké le jeudi 7 août 2008

 

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