Accueil >>  VIH/Sida >>  Informations médicales

Sida : lancement d’une nouvelle stratégie pour guérir l’infection


Libération, 19 juillet 2012 - La Société internationale sur le sida   (SID), qui rassemble des chercheurs à la pointe du combat contre la pandémie, a dévoilé jeudi à Washington une nouvelle stratégie visant à guérir l’infection.

Jusqu’à présent, les traitements antirétroviraux découverts dans les années 90 permettent de contrôler le virus du sida   (VIH  ) et de préserver la santé des personnes contaminées, mais pas d’éradiquer le pathogène.

Cette initiative, élaborée au cours des deux dernières années, a été présentée avant le début de la 19e Conférence internationale sur le sida   devant se tenir du 22 au 27 juillet à Washington. Quelque 25.000 participants sont attendus à cette conférence organisée par la SID.

Il s’agit de mobiliser le monde scientifique, les pouvoirs publics, le secteur privé et les donateurs dans le monde pour accélérer les efforts de recherche et aboutir plus vite à un moyen de guérir le sida  , qui a fait 35 millions de morts depuis son émergence il y a 30 ans.

"Cette stratégie résulte d’un effort de collaboration entre 34 chercheurs qui a débouché sur une feuille de route pour faire avancer la recherche vers une guérison de la contamination par le VIH  ", a déclaré devant la presse le Dr Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel de médecine pour la co-découverte du VIH   à l’Institut Pasteur à Paris.

"La science nous dit depuis un certain temps qu’il est désormais réaliste de pouvoir guérir l’infecton du VIH   et que le moment est venu de saisir l’occasion d’essayer de mettre au point un moyen de parvenir à une guérison", a expliqué Mme Barré-Sinoussi, future présidente de la SID.

"Nous pourrions regretter de n’avoir jamais essayé", a-t-elle ajouté.

Elle a toutefois admis en réponse à une question ne pouvoir dire combien de temps il faudrait ni combien pourrait coûter ce nouvel effort de recherche.

Ce nouvel optimisme s’appuie sur un certain nombre d’avancées scientifiques qui aident à mieux comprendre les raisons pour lesquelles le VIH   persiste à l’état latent dans l’organisme des malades traités avec des antirétroviraux.

Les scientifiques savent que les "réservoirs viraux" où se cache le virus constituent l’un des principaux obstacles à une guérison, a expliqué Steven Deeks, professeur de médecine à l’Université de Californie à San Francisco. C’est précisément la raison pour laquelle les thérapie antivirales ne parviennent pas à éradiquer le VIH  .

"Nous n’avions pas jusqu’à très récemment une compréhension claire des raisons pour lesquelles le VIH   persiste durant un traitement antirétroviral" à des niveaux imperceptibles, a-t-il ajouté. "Notre compréhension des mécanismes de persistance du VIH   à l’état latent est nettement supérieure à ce qu’elle était il y a dix ans", a souligné le professeur Deeks.

Selon lui, "nous parvenons à un stade de l’épidémie auquel nous pouvons commencer sérieusement à tester des traitements pour, soit empêcher cet état latent du VIH  , soit le forcer à sortir de sa cache pour le détruire.

Steven Deeks a aussi indiqué que la recherche se penchait sur le cas de l’Américain Timothy Brown, dit le "patient de Berlin", seul connu au monde à avoir guéri du sida   à la suite d’une greffe de moëlle osseuse pour traiter une leucémie. Le donneur était une des rare personnes capables de contrôler naturellement le VIH  .

Les virologues étudient également le cas d’un groupe de malades français qui ont pu arrêter une thérapie antirétrovirale sans que le virus ne réapparaisse.

Mark Harrington, militant anti-sida   de l’ONG "Treatment Action Group", a déploré lors de cette conférence de presse "le manque de volonté politique" pour une mobilisation globale visant à guérir le sida  .


Le professeur Barré-Sinoussi voit un nouvel élan vers la guérison du sida  

AFP, 20 Juillet 2012, Washington - Propos recueillis par Jean-Louis Santini - Le professeur Françoise Barré-Sinoussi, Nobel de médecine 2008 pour la co-découverte du virus du sida  , estime que guérir l’infection est désormais possible et a annoncé jeudi à Washington une stratégie mondiale pour mobiliser les talents et efforts vers cet objectif.

Cette annonce a été faite avant la 19e conférence internationale sur le sida   qui se tient dans la capitale américaine du 22 au 27 juillet et où 25.000 participants sont attendus.

Pourquoi peut-on davantage espérer aujourd’hui parvenir à guérir le sida   ?

Tout d’abord en raison de l’accumulation de nos connaissances scientifiques avec le patient de Berlin, le seul au monde qui semble avoir été guéri après avoir subi une transplantation de moelle osseuse, ce qui nous donne la preuve qu’arriver à éliminer le virus du corps est quelque chose de réaliste. La deuxième raison c’est que l’on a une petite proportion de patients —moins de 0,3%— qui contrôlent naturellement leur virus de façon permanente sans jamais avoir reçu le moindre traitement. Enfin, nous avons un groupe de patients en France qui ont reçu un traitement classique par des antirétroviraux, puis qui les ont arrêtés et qui vivent aujourd’hui sans traitement en contrôlant parfaitement leur infection. On a également beaucoup appris ces dernières années sur les mécanismes qui expliquent pourquoi le virus reste persistant dans le corps (des personnes sous antirétrovitaux, ndlr). Ces mécanismes nous ont permis de commencer à élaborer des stratégies thérapeutiques dont certaines ont déjà donné des résultats préliminaires qui encouragent à poursuivre ces recherches. Il y a donc de l’espoir... mais ne me demandez pas de date, car nous ne savons pas.

Le thème principal de la conférence de Washington est la possibilité de mettre fin à la pandémie avec les traitements antirétroviraux existants : est-ce possible, quand et à quel prix ?

Sur le principe, oui c’est possible. Avec les traitements actuels on sait très bien qu’en 2050, si on suit les modèles (informatiques), et si toute personne infectée peut avoir accès au traitement, on devrait être capable d’éliminer cette épidémie mondiale. Dans la réalité, il y a des obstacles financiers, d’organisation et d’accès aux personnes touchées par le VIH   (virus de l’immunodéficience humaine, ndlr). Il faut aussi lutter contre la discrimination et la stigmatisation, qui sont le premier obstacle. Pour le dépistage, il faut revoir le système de santé dans les pays les plus pauvres pour que toutes les populations, où qu’elles se trouvent, y compris dans des zones très retirées, puissent avoir accès aux tests et aux traitements. Ce qui fait de cette approche, que nous souhaitons bien entendu, une approche difficilement réalisable sur le long terme. D’où l’idée d’associer, pour aller vers un monde sans sida  , les traitements actuels et d’y greffer les nouveaux traitements de demain, car c’est grâce à eux qu’on arrivera à cette génération sans sida  . Et à la conférence de Washington on attend une mobilisation plus forte, en particulier des politiques, pour justement élargir cet accès aux traitements actuels et pour continuer la recherche sur le VIH  .

Où en sommes-nous dans la recherche d’un vaccin ?

La recherche vaccinale avance aussi en parallèle. Bien sûr l’essai clinique réalisé en Thaïlande a été le premier pour lequel on a constaté une petite efficacité, très modeste. On a appris et on continue à apprendre de cet essai clinique mais il faut en refaire de nouveaux car tout n’est pas exploitable. Et la recherche vaccinale continue avec une approche qui me semble bien meilleure à présent, car elle permet de déterminer les mécanismes précis qu’il faut savoir induire par un vaccin pour obtenir une protection.


VOIR EN LIGNE : Libération
Publié sur OSI Bouaké le vendredi 20 juillet 2012

 

DANS LA MEME RUBRIQUE