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“Un mot, des morts” : de Russie aussi on expulse les étrangers malades du VIH/ Sida

Refus d’accorder un permis de séjour en raison de la séropositivité du ressortissant étranger


Combat pour les droits de l’homme - 15 mars 2011 - par Nicolas Hervieu

Cour européenne des droits de l’homme (EDH), 1e Sect. 10 mars 2011, Kiyutin c. Russie.

La législation russe qui refuse l’octroi d’un permis de séjour à un étranger au motif qu’il est infecté par le VIH   (Virus de l’Immunodéficience Humaine) et qui va même jusqu’à prévoir l’expulsion des étrangers dont la séropositivité est détectée ou contractée ultérieurement est source d’une discrimination dans la jouissance du droit au respect de la vie privée et familiale (Art. 14 combiné à l’article 8). Pour parvenir à cette solution protectrice des personnes atteintes par le VIH  , la Cour européenne des droits de l’homme a développé une argumentation remarquable à plus d’un titre, ne serait-ce que par les techniques interprétatives mobilisées à cette occasion. Cet arrêt offre également d’utiles pistes de réflexions au sujet d’une autre question qui, au regard de son actualité au sein de certains États parties tels que la France, ne manquera pas de resurgir dans le prétoire strasbourgeois : le droit d’accès aux soins pour les ressortissants étrangers.

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De nationalité ouzbèke, un homme s’installa en 2003 dans un village de la région d’Oryol (à l’ouest de la Russie) en compagnie d’autres membres de sa famille. Il se maria la même année avec une ressortissante russe et, en 2004, eut un enfant avec cette dernière. Toutefois, depuis son arrivée, ses différentes demandes de permis de résidence furent rejetées par les autorités russes car l’examen médical requis pour l’obtention d’un tel titre révéla que l’intéressé était séropositif. Or la législation russe prévoit que l’infection par le VIH   (Virus de l’Immunodéficience Humaine, source du SIDA  ) est un motif légitime de refus du permis de résidence et permet même l’expulsion d’un étranger ou apatride déjà présent sur le territoire s’il s’avère qu’il a contracté ladite maladie (v. § 16-23). Les juridictions internes saisies par le ressortissant ouzbèke confirmèrent ce refus en s’appuyant notamment sur la position de la Cour constitutionnelle de Russie qui, dans une décision du 12 mai 2006, jugea la législation litigieuse conforme à la Constitution russe.sida  -russie.1300131566.jpg

La condamnation de la Russie pour discrimination dans la jouissance du droit au respect de la vie privée et familiale (Art. 14 combiné à l’article 8) prononcée dans cette affaire par la Cour européenne des droits de l’homme - au surplus à l’unanimité des sept juges de la formation de chambre - ne surprend guère. Mais l’importance de cette solution strasbourgeoise ne peut pleinement se mesurer qu’une fois achevée la lecture de la remarquable argumentation exposée par la Cour afin d’y parvenir. Dans son arrêt, en effet, la juridiction européenne met plusieurs de ses techniques interprétatives les plus dynamiques au service d’une protection accrue des personnes atteintes par le VIH  .

Ceci est perceptible dès le premier stade de l’examen conventionnel : la détermination de l’applicabilité de l’article 14 combiné à l’article 8. Il est ainsi classiquement rappelé que si “le droit d’un étranger d’entrer ou de s’établir dans un pays donné n’est pas garanti par la Convention“, “l’État doit néanmoins mettre en œuvre sa politique d’immigration d’une façon qui soit compatible avec les droits du ressortissant étranger, en particulier le droit au respect de la vie privée et familiale et le droit de ne pas subir de discriminations” (§ 53 - v. ainsi Cour EDH, 2e Sect. 20 mai 2010, Norma Jeanne Cox c. Turquie, Req. n° 2933/03 - ADL du 20 mai 2010). Mais surtout, après avoir admis que la situation litigieuse entrait bien dans le champ de la vie familiale du requérant (§ 55), la Cour apporte une précision qui est autant une confirmation qu’une progression. A la question de savoir si le VIH   est un motif de distinction prohibé par la Convention, la Cour répond par l’affirmative en soulignant, une fois encore, que la liste de ces motifs prévue à l’article 14 n’est pas limitative (§ 56 - en ce sens, v. Cour EDH, G.C. 16 mars 2010, Carson et autres c. Royaume-Uni, Req. n° 42184/05 - ADL du 16 mars 2010 ; Cour EDH, 4e Sect. 13 juillet 2010, Clift c. Royaume-Uni, Req. n° 7205/07 - ADL du 27 juillet 2010 ; Cour EDH, 3e Sect. 30 novembre 2010, P.V c. Espagne, Req. n° 35159/09 - ADL du 3 décembre 2010. V. Catégorie “article 14 CEDH“) et qu’une “distinction fondée sur un élément lié à l’état de santé, tel que le fait d’être infecté par le VIH  , doit être considérée comme entrant - aussi comme une sorte de handicap   ou une source de ce dernier - dans les « autres situations » visées à l’article 14 de la Convention“ (§ 57 - « a distinction made on account of one’s health status, including such conditions as HIV infection, should be covered - either as a form of disability or alongside with it - by the term “other status” in the text of Article 14 of the Convention »). Nulle surprise, cependant, car les juges strasbourgeois ont récemment estimé que l’état de santé pouvait entrer dans cette liste (sur le handicap   : Cour EDH, 1e Sect. 30 avril 2009, Glor c. Suisse, Req. no 13444/04 - ADL du 30 avril 2009 ; sur l’état de santé et les caractéristiques génétiques : Cour EDH, 2e Sect. 1er décembre 2009, G. N. et autres c. Italie, Req. n° 43134/05 - ADL du 2 décembre 2009). Mais la Cour prend ici bien soin de motiver sa solution en recourant abondamment - et une première fois dans cet arrêt - à diverses sources internationales et européennes (§ 57 - sur cette méthode, v. Cour EDH, G.C. 12 novembre 2008, Demir et Baykara c. Turquie, Req. n° 34503/97 - ADL du 14 novembre 2008 ; Cour EDH, G.C. 27 avril 2010, Tănase c. Moldavie, Req. n° 7/08 - ADL du 30 avril 2010. Catégorie “Handicap  ”).

Même fondée sur un critère prohibé - l’infection par le VIH   (§ 60-61) -, la différence de traitement litigieuse n’en devient toutefois pas, ipso facto, inconventionnelle. L’État peut en effet faire valoir que cette différence de traitement reposait sur une “justification objective et raisonnable” car poursuivait de façon proportionnée un but légitime (§ 62). Mais par une démarche en deux temps, la Cour rejette fermement une telle absolution conventionnelle du refus de permis de résidence reposant sur un tel motif.

Premièrement, de façon générale, la liberté dont dispose l’État pour traiter différemment les étrangers atteints par le VIH   est enserrée dans de très fortes limites, comparativement à d’autres domaines (par exemple, en matière économique et sociale, v. Cour EDH, G.C. 2 novembre 2010, Şerife c. Turquie, Req. n° 3976/05 - ADL du 3 novembre 2010). Ce sont les raisons justifiant cette limitation qui méritent l’attention. D’une part, les juges strasbourgeois usent de nouveau d’un raisonnement extrêmement fertile selon lequel “si une restriction des droits fondamentaux s’applique à un groupe particulièrement vulnérable dans une société, qui a souffert par le passé de discriminations considérables, alors la marge d’appréciation des États est substantiellement restreinte et il doit exister de très lourds motifs pour justifier les restrictions en question. La raison de cette approche, qui interroge certaines classifications en soi, est que de tels groupes ont été historiquement l’objet de préjugés aux conséquences durables, qui ont conduit à leur exclusion sociale. Ces préjugés peuvent impliquer des stéréotypes législatifs qui interdisent l’évaluation individuelle de leurs capacités et de leurs besoins” (§ 63 : « If a restriction on fundamental rights applies to a particularly vulnerable group in society that has suffered considerable discrimination in the past, then the State’s margin of appreciation is substantially narrower and it must have very weighty reasons for the restrictions in question. The reason for this approach, which questions certain classifications per se, is that such groups were historically subject to prejudice with lasting consequences, resulting in their social exclusion. Such prejudice could entail legislative stereotyping which prohibited the individualised evaluation of their capacities and needs » - Cour EDH, 2e Sect. 20 mai 2010, Alajos Kiss c. Hongrie, Req. n° 38832/06 - ADL du 28 mai 2010. V. catégories “marge nationale d’appréciation” ou “Hongrie“) Après avoir estimé que faisaient partis de cette catégorie les groupes discriminés du fait de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur race ou identité ethnique, de leurs facultés mentales ou de leur handicap   (§ 63), les juges strasbourgeois considèrent désormais, au terme d’une riche analyse, que tel est aussi le cas des “personnes vivant avec le VIH  ” car ils constituent “un groupe vulnérable marqué par un passé de préjugés et de stigmatisations“ (§ 64 - « people living with HIV are a vulnerable group with a history of prejudice and stigmatisation »).

D’autre part, un second élément vient restreindre la liberté des États : l’absence d’un “consensus européen” soutenant “l’exclusion des séropositifs” demandeurs d’un permis de résidence. La Cour relève ainsi que sur quarante-sept États membres du Conseil de l’Europe, seuls six conditionnent l’octroi d’un permis de résidence à un test destiné à établir la séronégativité (sans compter la Lituanie qui n’exige qu’une attestation écrite de l’intéressé) dont trois vont jusqu’à prévoir l’expulsion des étrangers dont la séropositivité seraient détectée ou contractée après l’entrée sur le territoire (§ 65 - v. les données comparatives européennes mais aussi internationales aux § 36-38 ; Sur la notion de consensus européen, v. des résultats très contrastés qui révèlent combien l’identification et la fonction de ce consensus sont dépendantes de l’appréciation du juge européen : Cour EDH, 1e Sect. 7 octobre 2010, Konstantin Markin c. Russie, Req. n° 30078/06 - ADL du 8 octobre 2010 ; Cour EDH, G.C. 16 décembre 2010, A. B. C. c. Irlande, Req. n° 25579/05 - ADL du 17 décembre 2010. V. Catégorie “méthode consensuelle” ).

Deuxièmement, et de façon plus particulière, la Cour démonte méthodiquement l’argumentation de l’État russe cherchant à justifier la différence de traitement. Après avoir lapidairement rejeté comme insuffisamment étayés les motifs tenant à une prétendue “menace pour la sécurité nationale” ou aux “conséquences socio-économiques et démographiques“, la juridiction européenne fixe l’argument qui semble avoir être le plus sérieusement avancé par la Russie : “la protection de la santé publique” (§ 66). Et dès cet instant, plusieurs séries de fortes critiques européennes sont dirigées contre le principe même des restrictions à l’entrée et au séjour des étrangers au motif qu’ils sont atteints par le VIH   :

  • 1°/- Utilisant de nouveau une méthode éprouvée (Cour EDH, G.C. 12 novembre 2008, Demir et Baykara c. Turquie, Req. n° 34503/97 - ADL du 14 novembre 2008. V. catégorie “norme extraconventionnelle“), la Cour “tient compte des instruments et rapports internationaux pertinents“ (§ 28-26) pour souligner qu’il existe incontestablement “un consensus parmi les experts et les organes internationaux agissant dans le domaine de la santé publique [pour affirmer] que les restrictions aux voyages des personnes séropositives ne peuvent être justifiées par référence à des motifs de santé publique” (§ 67 - on notera que les multiples sources citées ont notamment été mises en lumière par la très riche tierce intervention de l’ONG Interights - § 46-51). Certes, les juges européens n’excluent pas que des restrictions aux voyages puissent parfois poursuivre légitimement ce but de protection de la santé, en particulier lorsqu’il s’agit de lutter contre la diffusion de “maladies hautement contagieuses avec une courte période d’incubation, telles que le choléra ou la fièvre jaune ou, pour prendre des exemples plus récents, le […] SRAS ou le grippe aviaire” (§ 68). Le VIH  , lui, “ne se transmet pas par hasard mais plutôt par des comportements spécifiques tels que les rapports sexuels et le partage de seringues, qui sont les principaux vecteurs de transmission“ (§ 68 : « HIV is not transmitted casually but rather through specific behaviours that include sexual intercourse and sharing of syringes as the main routes of transmission »). La Cour rejette donc vertement les présupposés de la législation russe qui sous-entend d’ailleurs que les étrangers atteints du VIH   auraient nécessairement et par principe un comportement à risque (§ 68)
  • 2°/- L’incohérence de la législation russe est ensuite mise en exergue par les juges strasbourgeois. Ces derniers soulignent en effet que les touristes et autres personnes qui entrent en Russie lors de courtes périodes ne sont pas soumis à ces tests VIH  . Pourtant, “la grande majorité des voyageurs et migrants” en Russie relèvent de cette dernière catégorie et “les méthodes de transmission du VIH   demeurent les mêmes, indépendamment de la durée de la présence d’une personne sur le territoire russe et indépendamment de sa nationalité” (§ 69). Dès lors, cette incohérence “jette un doute sur la sincérité des préoccupations gouvernementales de santé publique concernant la présence du requérant en Russie“. La Cour en conclut surtout que le régime litigieux de restrictions visant les étrangers qui souhaitent résider à long terme en Russie “n’est pas une démarche effective dans la prévention de la transmission du VIH   par les migrants séropositifs” (§ 69 - « the application of HIV‑related restrictions only in the case of prospective long-term residents is not an effective approach in preventing the transmission of HIV by HIV‑positive migrants »).
  • 3°/- A l’argument du gouvernement russe selon lequel les étrangers séropositifs constitueraient “une charge publique et provoqueraient une sollicitation excessive du système de protection sociale financé par des fonds publics“, la juridiction strasbourgeoise se borne à souligner qu’en Russie, sauf traitements urgents, les étrangers - fussent-ils titulaires d’un permis de résidence - n’ont pas droit à une assistance médicale gratuite (§ 70). Il est toutefois regrettable qu’à cette occasion, la Cour n’ait pas donné quelques pistes de réponses à une question qui vient immédiatement à l’esprit : dans le cas où la législation d’un État permet effectivement aux étrangers séropositifs de bénéficier de soins gratuits, l’argument économique peut-il être efficacement avancé par cet État pour justifier le refus d’entrée des étrangers séropositifs voire leur expulsion ?
  • 4°/- Par un notable renversement de perspective, la Cour ne se borne pas à juger la législation litigieuse “inefficace dans la prévention de la diffusion de la maladie“ : elle va jusqu’à la qualifier de “nuisible pour la santé publique du pays” (§ 71 : « travel and residence restrictions on persons living with HIV may not only be ineffective in preventing the spread of the disease, but may also be actually harmful to the public health of the country »). En effet, cette législation dissuade finalement les étrangers en situation irrégulière de solliciter un dépistage du VIH  , ce qui rend plus difficile encore la prévention de la maladie et son endiguement. Plus remarquable encore, les juges européens insistent sur un autre risque de la discrimination : “l’exclusion des étrangers séropositifs peut créer un faux sentiment de sécurité en encourageant la population locale à considérer le VIH  /SIDA   comme un ‘problème étranger‘ ” et donc inciter ladite population à penser qu’elle n’a pas besoin, elle-même, d’adopter les comportements adéquats contre la maladie (§ 71).
  • 5°/- Enfin, la Cour critique sévèrement la dimension globalisante de la mesure d’exclusion des étrangers atteints par le VIH   qui “ne laisse aucune place à une appréciation individualisée basée sur les faits d’un cas particulier” (§ 72-73 - Cour EDH, 2e Sect. 20 mai 2010, Alajos Kiss c. Hongrie, Req. n° 38832/06 - ADL du 28 mai 2010 et, dans un autre contexte, Cour EDH, 4e Sect. 14 décembre 2010, O’Donoghue et autres c. Royaume-Uni, Req. n° 34848/07 - ADL du 14 décembre 2010).

En condamnant fermement la Russie pour discrimination (§ 74), les juges du Palais de Droits de l’Homme avaient manifestement à l’esprit bien plus que le seul contentieux de l’espèce, notamment parce que ce constat de violation est susceptible d’affecter d’autres États parties dotés d’une législation similaire (l’Arménie, la Moldavie, Andorre, Chypre, la Slovaquie et même, dans une moindre mesure, la Lituanie). Surtout, et au-delà de la seule protection des personnes séropositives (v. Cour EDH, 3e Sect. 6 octobre 2009, C. C. c. Espagne, Req. n° 1425/06 - ADL du 9 octobre 2009 ; Cour EDH, 1e Sect. 22 décembre 2008, Aleksanyan c. Russie, Req. n° 46468/06 - ADL du 3 janvier 2009), cet arrêt témoigne de nouveau du volontarisme de la Cour en matière d’appréhension des discriminations (Cour EDH, 2e Sect, Dec. 9 novembre 2010, Tibor Horváth et Géza Vadászi c. Hongrie, Req. n° 2351/06 - ADL du 30 novembre 2010) et de l’actualité de la notion de « groupe vulnérable » (Cour EDH, G.C. 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, Req. n° 30696/09 - ADL du 21 janvier 2011 (2)).

Cette incontestable progression éveille également d’autres enjeux, non moins déterminants, tel que le droit d’accès aux soins pour les étrangers. Dans le contexte de l’expulsion des étrangers malades, la jurisprudence strasbourgeoise a déjà refusé de déduire de la Convention, et en particulier de son article 3 (interdiction de la torture), une « obligation [pour] l’État contractant de pallier [les] disparités [socio-économiques entre les pays] en fournissant des soins de santé gratuits et illimités à tous les étrangers dépourvus du droit de demeurer sur son territoire » (Cour EDH, G.C. 27 mai 2008, N. c/ Royaume-Uni, Req. n° 26565/05, § 44 - ADL du 27 mai 2008 ; v. en particulier l’opinion dissidente commune aux juges Tulkens, Bonello et Spielman). Cette position a donc ouvert la voie, au plan national, à une possible restriction de l’accès aux soins au nom d’impératifs économiques (v. en France, la réintroduction par l’Assemblée Nationale, en deuxième lecture après sa suppression par le Sénat, de l’article 17 ter du Projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, réintroduction confirmée le 9 mars 2011. Cette disposition vise à réduire la portée d’un récent revirement de jurisprudence du Conseil d’Etat : CE, Sect. 7 avril 2010, Ministre de l’Intérieur c. M. Jabnoun et Ministre de l’Immigration c/ Mme Diallo épouse Bialy Res. Req. n° 301640 et n° 31662 - ADL du 8 avril 2010 et conclusions Guyomar, CPDH 20 avril 2010). Dans la même perspective, la législation française a également limité l’accès des ressortissants étrangers à l’Aide Médicale d’État ou AME   (Cons. const. 28 décembre 2010, Loi de finances pour 2011, n°2010-622 DC et IGF et IGAS, Rapport « Analyse de l’évolution des dépenses de santé au titre de l’aide médicale d’Etat », novembre 2010 - ADL du 16 janvier 2011). Autant d’initiatives qui démontrent que la Cour européenne des droits de l’homme ne manquera sans doute pas d’être de nouveau confrontée à cette question de l’accès aux soins des étrangers et ne pourra alors pas esquiver un réexamen de la pertinence d’une approche critiquée : la mise en balance des droits conventionnels des étrangers avec leur coût pour l’État d’accueil (pour un exemple plus récent mais dans un autre contexte, v. Cour EDH, 1e Sect. 29 juillet 2010, Mengesha Kimfe c. Suisse et Agraw c. Suisse, Resp. Req. nos 24404/05 et 3295/06 - ADL du 30 juillet 2010). Dans cette perspective, le pragmatisme dont la Cour fait preuve au sein de l’arrêt Kiyutin c. Russie, notamment au sujet de l’impératif de protection de la santé publique, offre des perspectives, certes limitées, mais néanmoins intéressantes.


Publié sur OSI Bouaké le mardi 15 mars 2011

 

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