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L’Union africaine attaque la CPI et ose piétiner la mémoire des victimes du Darfour !

L’Union africaine entrave activement le travail de la CPI et protège El Béchir


FIDH - Paris, Nairobi, Khartoum, Kampala, le 30 juillet 2010

La FIDH et ses organisations membres soudanaises, le African Center for Justice and Peace Studies (ACJPS) et le Sudan Human Rights Monitor (SUHRIM), déplorent vivement le refus de l’Union africaine (UA) de coopérer avec la Cour pénale internationale (CPI  ), exprimé à l’issue du 15ème Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement qui s’est tenu à Kampala en Ouganda, du 15 au 27 juillet 2010.

L’UA réitère sa volonté de voir différer les poursuites contre le président soudanais Omar El Beshir, ainsi que sa volonté d’amender l’article 16 du Statut de Rome afin de permettre à d’autres organes des Nations unies de demander à la CPI   de suspendre des poursuites en cas d’inaction de la part du Conseil de sécurité. Elle refuse également la mise en place d’un bureau de liaison de la CPI   auprès de l’UA et menace même de sanction les Etats africains parties au Statut de Rome qui dérogeraient aux décisions de l’UA.

Nos organisations rappellent que parmi les objectifs de l’UA définis dans son Acte Constitutif, les Etats membres doivent promouvoir et protéger les droits de l’Homme, conformément à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples.

Nos organisations soulignent par ailleurs que l’action de la CPI   sur la situation au Darfour résulte d’une saisine de la Cour par le Conseil de sécurité des Nations unies sur la base du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies et s’impose donc au Soudan et aux autres pays de l’UA.

Nos organisations rappellent en outre que la décision du Conseil de sécurité de déférer la situation du Darfour à la CPI   a été prise du fait de l’absence totale de justice au Soudan en dépit des crimes les plus graves commis à l’occasion du conflit qui oppose aujourd’hui encore les troupes gouvernementales et les groupes rebelles.

Pour mémoire, depuis 2003, ce conflit a entraîné la mort de plus de 300 000 personnes et forcé plus de 2 millions de civils à se réfugier ou à se déplacer sans qu’aucun acte sérieux de justice n’ait été pris au Soudan, comme l’ont confirmé le rapport 2004 de la Commission internationale d’enquête sur le Darfour mandaté par les Nations unies et le rapport 2009 du Panel de Haut Niveau mandaté par l’Union africaine. Conformément à son Statut et en vertu du principe de complémentarité, la CPI   n’aurait pas pu intervenir si la justice s’exerçait normalement et librement au Soudan.

La prise de position de l’UA se base notamment sur l’argument selon lequel la justice s’oppose à la paix au Darfour. Pourtant ce propos peut être inversé, comme l’explique Osman Hummaida, président du ACJPS : « c’est bien parce qu’aucun processus de justice n’a eu lieu au Soudan qu’aucune paix n’a jusqu’à présent été possible. Et c’est certainement l’action de la justice internationale sur ce pays qui a mené les acteurs du conflit à se remettre autour de la table des négociations pour trouver un règlement au conflit ».

Le second argument développé contre l’action de la CPI   vise le fait qu’elle n’intervient qu’en Afrique alors même que d’autres crimes graves sont commis ailleurs, y compris par des représentants de pays occidentaux. Si cela est un fait, peut-on pour autant, au prétexte de l’absence d’universalité de la compétence de la CPI  , piétiner la mémoire des 300 000 victimes du Darfour et des autres victimes africaines, de l’Ouganda, de la République démocratique du Congo, de la République centrafricaine ou encore du Kenya qui appellent de leur vœu l’intervention de la justice internationale pour lutter contre l’impunité ?

Nos organisations auraient souhaité une attitude plus cohérente et positive de la part de l’UA. « Celle-ci devrait plutôt appeler à l’universalité de la CPI   en appelant tous les Etats à se soumettre à sa juridiction et exiger de ses Etats membres qu’ils adoptent des législations internes permettant de juger les auteurs des crimes les plus graves, évitant ainsi la nécessité d’une intervention internationale. Elle devrait également accepter le dialogue avec la CPI   en autorisant la mise en place de son bureau de liaison auprès de l’UA et montrer l’exemple d’un continent qui refuse l’impunité comme l’on fait 30 de ses Etats membres en ratifiant le Statut de Rome », souligne Sidiki Kaba, président d’honneur de la FIDH.


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Publié sur OSI Bouaké le lundi 2 août 2010

 

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