Accueil >>  Zone Franche

"Avec nos yeux", un film avec Emmanuelle Laborit

En salle cette semaine à Paris, un film sur l’International Visual Thétâtre


OSI Bouaké, 6 juin 2013 - SD - Si vous ne connaissez pas l’IVT, le monde des sourds et la LSF, c’est le moment de suivre l’aventure d’Emmanuelle Laborit et des magnifiques comédiens de l’International Visual Théâtre. Ne ratez surtout pas Avec nos yeux, un documentaire complètement bilingue LSF, il est en salle cette semaine à Paris ! Il sortira l’année prochaine en DVD.

  • Avec nos yeux, un film réalisé par Marion Aldighieri, avec Emmanuelle Laborit, Chantal Liennel, Bachir Saïfi. Sortie le 5 juin 2013 au cinéma le Reflet Médicis, 3 Rue Champollion, 75005 Paris. Séances le 6 juin à 20h30, puis tous les jours à 20h jusqu’au 11 juin.

Synopsis

Avec nos Yeux est un voyage dans le monde des Sourds. Cette chronique, filmée sur plusieurs années, suit le combat de l’International Visual Theatre pour construire son lieu, au coeur de Paris. Emmanuelle Laborit, actrice passionnée et reconnue internationalement dirige cette compagnie professionnelle de comédiens sourds. En 1993, elle est la première comédienne sourde à recevoir un Molière pour sa performance dans les Enfants du Silence. Le Cri de la Mouette, son autobiographie, est un best-seller traduit en 14 langues. Emmanuelle Laborit est devenue l’ambassadrice médiatique de sa communauté. Défendant la langue des signes, longtemps interdite en France et dans plusieurs pays européens, la compagnie adapte, crée, et joue un répertoire éclectique du Roi Lear à La Marseillaise … Avec Nos Yeux fait découvrir coulisses, répétitions et vie du théâtre en croisant les histoires personnelles des comédiens sourds. Le film dévoile comment ces artistes s’efforcent d’obtenir une vraie place de citoyens et d’artistes.


L’International Visual Theatre se raconte au cinéma dans "Avec nos yeux"

Première - 05/06/2013 - Marie Plantin -

Aujourd’hui sort en salle Avec nos yeux, un documentaire passionnant réalisé par Marion Aldighieri sur l’installation en 2007 de l’International Visual Theatre (IVT) Cité Chaptal dans le 9ème arrondissement de Paris.

Avec nos yeux ne conte pas seulement l’histoire de l’installation de l’IVT dans les murs d’un vrai théâtre en plein cœur de la capitale. Certes, c’est là l’enjeu majeur que retrace le documentaire, le motif principal autour duquel sa narration s’articule. Car l’aventure ne fut pas une mince affaire et c’est un véritable parcours du combattant qui est ici exposé à rebours. Presque une fiction, avec ses personnages meneurs, ses seconds rôles indispensables, et tous les figurants qui gravitent dans leur entourage. Défis artistiques, administratifs, financiers, délais à tenir, impondérables, enjeux personnels, collectifs et sociaux, épreuves à surmonter, Avec nos yeux est le film d’une réalisation, celle d’un projet utopique et nécessaire : donner aux sourds un théâtre, un lieu de culture qui soit accessible à tous, que l’on entende ou pas, un lieu d’ouverture à l’encontre de toute forme de « ghettoïsation ». On y suit non seulement le déroulement concret des travaux de rénovation et remise aux normes, de réaménagement de la salle elle-même, du lieu globalement, mais aussi les problématiques administratives et financières, les difficultés inhérentes à la singularité du projet, les questions essentielles de communication, ainsi que l’élaboration du premier spectacle qui fit l’ouverture du théâtre, K.Lear, une adaptation en français et langue des signes française du Roi Lear de Shakespeare par la metteur en scène Marie Montegani, mêlant comédiens sourds et entendants. A sa manière, le documentaire de Marion Aldighieri est une épopée et les acteurs (au sens large du terme) de cette aventure sont héroïques, en tête de cortège Emmanuelle Laborit, à l’origine de cette entreprise historique.

Directrice depuis 2003 de l’Association IVT avec laquelle elle a produit plus d’une trentaine de spectacles, Emmanuelle Laborit est une personnalité hors du commun dont Avec nos yeux trace le portrait en creux et en action. Comédienne sourde, ardente défenseuse de la Langue des Signes, l’actrice a obtenu le Molière de la Révélation théâtrale féminine en 1993 pour son rôle dans Les Enfants du Silence, mis en scène par Jean Dalric. Une première revanche sur la vie pour celle qui, enfant, quand elle exprimait son rêve de devenir comédienne, se voyait moquée par ses professeurs en vertu du prétexte qu’elle ne parlait pas. Déjà, elle avait pressenti une vertu essentielle du spectacle vivant : le théâtre peut se passer de mots pour exprimer des émotions et partager ce qu’il a à transmettre. Pionnière intuitive, militante redoutable, Emmanuelle Laborit dédit sa vie aux problématiques liées à la surdité et cherche inlassablement à créer des passerelles d’intégration et d’accès des sourds à l’art. Paradoxalement, elle est une porte-parole. Une porte-parole tenace et enthousiaste de la communauté sourde qui se bat pour la reconnaissance de la Langue des Signes, soutient l’accès des sourds à la culture et notamment la culture audiovisuelle, défend un théâtre accessible aux sourds et aux entendants simultanément. Le documentaire de Marion Aldighieri est aussi l’occasion de découvrir cette femme exceptionnelle et son action multiple : Femme de pensée et de combat qui déjoue préjugés et à priori sur la communauté sourde, meneuse de troupe aux épaules large qui rassemble au sein de son association une équipe mixte soudée et investie, femme de jeu qui pratique son métier de comédienne sur les planches de théâtre et les écrans de cinéma (Claude Lelouch, Yves Angelo…). Emmanuelle Laborit est une missionnaire. Elle déplace des montagnes par la force de ses convictions, de sa volonté, de ses mains volubiles. Elle est impressionnante et nous laisse en bout de course scotchés d’admiration.

Plus que le récit épique de l’installation de l’International Visual Theatre dans les murs d’un vrai théâtre, ce documentaire nous invite à la rencontre d’un monde qui nous est inconnu à nous qui entendons, le monde des sourds, à la découverte d’une langue étrangère, la langue des signes. Et nous ouvre assurément les yeux.Par


Publié sur OSI Bouaké le jeudi 6 juin 2013

 

DANS LA MEME RUBRIQUE