Accueil >>  VIH/Sida >>  Accès aux ARV et aux soins >>  UNITAID - Taxe sur les billets d’avion

Unitaid, un an après, cherche encore ses soutiens

Le fonds de lutte contre les pandémies reste fragile malgré un bilan positif.


Mots-Clés / Unitaid

Par CHRISTIAN LOSSON - Libération : lundi 24 septembre 2007

Adoubé par l’ONU  , et désormais adossée à l’OMS   (Organisation mondiale de la santé), Unitaid  , lancé par la France et à laquelle participent 27 pays (dont 19 en Afrique), fête sa première bougie. Bilan en demi-teinte. La taxe sur les billets d’avion, qui ponctionne entre 1 et 40 euros en fonction de la classe et de la destination, marche. Elle a déjà réussi à faciliter l’achat de médicaments. Et tout cela contre pas mal de vents - soufflés par le lobby des compagnies aériennes (1) - et beaucoup de marées de sourires entendus (notamment des libéraux hostiles à toute forme de fiscalité transnationale).

Partenaires. En un an, 300 millions de dollars (213 millions d’euros) sont rentrés dans les caisses. De quoi permettre des garanties d’achats massives ; de faire jouer la concurrence entre ­labos ; de stimuler l’arrivée de nouveaux partenaires. Si Pepfar  , le plan américain antisida, achète des médicaments de marque au prix lourd, Unitaid   a, lui, prouvé que l’on pouvait parvenir à faire baisser le prix des traitements. Notamment les antirétroviraux de seconde ligne, les plus chers, qu’Unitaid   négocie entre 25 % et 50 % à la baisse. Environ 65 000 patients devraient en bénéficier d’ici à 2008. En partenariat avec la Fondation Clinton, Unitaid   a aussi mis depuis dix mois sur les rails des formulations pédiatriques pour les enfants de 3 à 12 ans. Une nécessité largement boudée jusque-là par les grands laboratoires. Résultat, comme peut s’en vanter Clinton : « On a négocié une baisse de 196 dollars à 60 dollars. » Si bien que 33 000 enfants ont reçu un traitement ; 100 000 d’ici à la fin de l’année. Sur le front des autres pandémies, les avancées restent moindres. 1,3 million d’antipaludisme deuxième génération (sur lesquels l’OMS   a eu du retard à l’allumage) ont quand même été fournis au Burundi et au Liberia, et un traitement contre les tuberculoses résistantes devrait être fourni à 150 000 enfants dans 19 pays... Au-delà de l’éternel débat sur une énième structure travaillant sur les questions de santé publique, Unitaid   tarde à embarquer à son bord de grands pays. Emergents (Inde ou Chine) ou pas (Etats-Unis, Russie). Sans parler de sa difficulté à convaincre ses partenaires européens (Norvège et Royaume-Uni, Luxembourg, excepté)... Du coup, on est encore loin du 1,5 milliard de dollars (1 milliard d’euros) fantasmé par la France, même si Unitaid   espère porter son budget à 500 millions de dollars en 2008. Encore faut-il que l’environnement suive. Il ne suffit pas d’acheter des pilules, il faut les distribuer (et gratuitement, ce que ne font pas tous les pays, dont certains se sucrent au passage). Unitaid   compte donc aussi sur le Fonds mondial de lutte contre le sida   pour assurer l’intendance, à commencer par le personnel soignant. Un Fonds dont la pérennité du budget - par nature et par principe - destiné à être augmenté (plus on met de malades sous traitement à vie, plus il faut d’argent) est sans cesse menacé par la pingrerie des Etats (2). Reste la question du leadership. Très opportuniste, Philippe Douste-Blazy, un temps président par intérim de Unitaid   lorsqu’il fut ministre des affaires étrangères, a ferraillé pour trouver un point de chute ( « son nouveau joujou », raille un administrateur). Il s’est fait bombarder président du conseil d’administration, tandis que le Brésilien Jorge Bermudez est, lui, directeur d’Unitaid  .

Cuisine. « Certains pays, comme la Norvège ou la Grande-Bretagne, rappelle un membre du ­conseil d’administration, trouvent ce deal un rien cavalier » et grimpent au rideau. « Non, ce n’est pas un parachutage, cela n’a rien de scandaleux », rétorque un diplomate français. A part cette cuisine interne, au sujet de laquelle on ajoutera les lenteurs bureaucratiques de l’OMS   pour recruter le secrétariat d’Unitaid   (dix mois pour embaucher le premier fonctionnaire), la création de Jacques Chirac est loin d’avoir atteint une vitesse supersonique.

(1) Air France, premier à pousser des cris d’orfraie, affiche un + 5 % sur un an de son trafic passager en septembre 2007.

(2) Le Fonds se réunit mercredi à Berlin pour plancher sur son budget à venir, avec l’éternelle menace de voir la contribution des Etats (France en tête) se rétrécir...


VOIR EN LIGNE : Libération
Publié sur OSI Bouaké le samedi 29 septembre 2007

 

DANS LA MEME RUBRIQUE