OSI Bouaké - Côte d’Ivoire : Les femmes continuent d’approvisionner les marchés Accueil >>  Et en Afrique, on dit quoi ?

Côte d’Ivoire : Les femmes continuent d’approvisionner les marchés



Abidjan, 18 mars 2011 (IRIN) - La marchande de légumes Caroline Tibet a récemment perdu environ 420 dollars d’aubergines, de manioc et de gombos lorsque des tirs ont éclaté près du camion qu’elle venait juste de charger près de la ville de Duékoué, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire.

« Mon investissement est parti en fumée », a-t-elle dit à IRIN. Cela n’a pas empêché Mme Tibet et des centaines d’autres femmes de braver les tirs, les couvre-feux et les dangereux barrages routiers érigés un peu partout pour approvisionner le marché central d’Abidjan, la capitale commerciale.

« Les risques sont énormes », a-t-elle dit à IRIN au Marché Gouro, dans le district d’Adjamé. Les habitants d’Abidjan y viennent tous les jours se procurer des fruits et des légumes. « Seulement, si nous baissons les bras, il n’y aura rien sur les marchés et la population ressentira encore plus durement les effets de la crise ».

Les commerçants font régulièrement le trajet entre Abidjan et les plantations situées dans l’ouest du pays. Depuis quelques temps, leur horaire est largement dicté par les couvre-feux. « Une fois la nuit tombée, nous dormons sous les camions avec les chauffeurs », explique Mme Tibet. « Lorsque le soleil se lève, une fois que les routes sont de nouveau ouvertes à la circulation, nous rentrons à Abidjan ». Les femmes expliquent qu’en temps normal, il est d’usage de retourner à Abidjan même lorsqu’on finit de charger un camion à une heure du matin.

Ces contraintes ont des conséquences sur leur vie familiale. « C’est un gros sacrifice que nous faisons », a dit Chantale Abou, mère de trois enfants. « Nous voyons à peine nos enfants ».

Mais les femmes demeurent optimistes. « La situation de crise a peut-être conduit à la baisse de nos activités, mais cela n’a pas entamé notre moral à rendre disponibles les produits vivriers sur le marché et éviter la famine », a dit à IRIN Bernadette Trazié Lou, commerçante de bananes plantain.

« Mais le plus important est le retour rapide à la paix », a dit Ta Lou Irié, présidente du Conseil d’administration du Marché Gouro. « Tout appartient à nos politiciens. Ils nous doivent la paix pour que toutes les activités économiques soient relancées comme par le passé ».

Hausse des prix

D’après un homme d’Abidjan qui a demandé à garder l’anonymat, l’instabilité qui règne dans le pays se traduit sur les marchés. En effet, les denrées alimentaires ne sont pas aussi abondantes que d’habitude. « Certains aliments se font rares mais les gens s’approvisionnent tout de même et les choses sont disponibles dans les marchés.Ce qui est certain, c’est que tout est plus cher ». Les femmes du marché d’Adjamé ont dit que l’augmentation significative des coûts de production se traduirait inévitablement par une hausse des prix.

Au marché, les clients s’informent des prix des denrées et font des calculs pour savoir ce qu’ils peuvent s’offrir ce jour-là pour nourrir leur famille.

« Les vendeuses ne sont pas responsables de la hausse des prix », a dit Mme Lou Irié à IRIN. « Nous avons besoin de tracteurs, de véhicules de ramassage, de camions remorques pour ramasser les bananes, les ignames, les aubergines, les tomates, les piments ». Les coûts de transport ont monté en flèche à cause de la multiplication des barrages. Même en payant l’équivalent de 160 dollars pour faire partie d’un convoi « sécurisé », les femmes se font souvent extorquer beaucoup d’argent aux barrages routiers.

« De 20 000 francs CFA [42 dollars] le voyage de 30 tonnes, nous déboursons maintenant 35 000 francs CFA », a indiqué Mme Trazié Lou. « De cinq régimes de bananes à 1 000 francs CFA, nous sommes passés à trois régimes au même prix », a-t-elle ajouté.

Les commerçants des autres quartiers d’Abidjan doivent souvent faire de longs détours pour ramener de la nourriture d’Adjamé, a indiqué un résident du quartier d’Anyama, largement acquis à la cause d’Alassane Ouattara. « Des pro-Gbagbo bloquent souvent les femmes lorsqu’elles quittent Adjamé pour amener les aliments à Anyama, les obligeant ainsi à faire des grands détours ».

Le Marché Gouro (les Gouro sont un groupe ethnique du centre-ouest du pays) est l’épicentre de la Fédération nationale des coopératives de vivriers de Côte d’Ivoire (FENACOVICI), qui compte quelque 200 000 membres des deux sexes.

Ses membres ont annoncé que les consommateurs assisteraient bientôt à une légère baisse des prix. En effet, la Fédération a récemment fait l’acquisition de camions et devrait ainsi pouvoir économiser sur les frais de location.


VOIR EN LIGNE : Irin Plus News
Publié sur OSI Bouaké le jeudi 7 avril 2011

LES BREVES
DE CETTE RUBRIQUE


vendredi 23 novembre