Accueil >>  VIH/Sida >>  Actualités

Le Fonds mondial durcit ses conditions de financement


DAKAR, 28 juin 2005 (PLUSNEWS) - Le Fonds mondial de lutte contre le sida  , la tuberculose et le paludisme a dit mardi attendre davantage de résultats de la part des pays bénéficiaires, à qui il demande d’utiliser les fonds de façon plus efficace et transparente.

“On avait le choix entre avoir une approche plus musclée [de la réponse aux trois épidémies], ou ralentir le processus et rater l’occasion de sauver des vies”, a dit à PlusNews Mabingue Ngom, le responsable du Fonds mondial pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre alors que s’ouvrait une réunion régionale à Dakar.

Cette rencontre de trois jours dans la capitale sénégalaise a pour but d’informer 12 pays d’Afrique francophone des nouvelles orientations du Fonds mondial en matière d’attribution des financements. L’institution financière entend ainsi optimiser l’utilisation des aides et éviter les gaspillages et les conflits d’intérêt constatés dans plusieurs pays bénéficiaires.

Le Fonds mondial a entériné en avril le renforcement des conditions d’éligibilité des pays aux mécanismes de financements, une réflexion qui a démarré en juillet dernier.

Ces nouveaux critères d’éligibilité sont applicables dès la cinquième série d’appels à propositions du Fonds (ou Round 5) dont la date de clôture des candidatures était fixé au 10 juin et qui sera soumis au Conseil d’administration en septembre prochain.

Les besoins en financement de l’Afrique de l’Ouest et centrale sont estimés à près d’un milliard de dollars. Or à l’heure actuelle, les promesses de dons n’atteignent pas 500 millions de dollars, selon Ngom.

Parmi les conditions imposées figure l’obligation pour les Etats bénéficiaires de garantir la participation de tous les partenaires de la lutte contre les épidémies, et notamment de la société civile, au sein de l’Instance de coordination nationale (CCM, en anglais), l’organisme chargé de la gestion des subventions du Fonds mondial dans chaque pays.

“Le CCM est un pilier fondamental du mécanisme de gestion des financements du Fonds mondial”, a dit Ngom. “C’est lui qui identifie les programmes et les conçoit, qui détermine quels en seront les bénéficiaires et qui surveille la mise en oeuvre des projets”.

“L’argent est donné sur l’hypothèse que cette instance est un véritable partenariat”, a poursuivi Ngom. “Si ce n’est pas le cas, alors tout s’écroule”.

Or dans un certain nombre de pays, la représentativité des différents partenaires n’est pas assurée, les gouvernement étant largement représentés souvent au détriment de la société civile, ont rappelé des responsables du Fonds mondial lors de la séance d’ouverture de la réunion mardi.

Même dans les pays où la représentativité des partenaires semble assurée, elle est parfois artificielle, a ajouté le Fonds mondial.

Une structure telle que le CCM permet de contourner les structures traditionnelles qui excluaient les “forces vives”, comme les représentants de la société civile, a expliqué Ngom. Mais certains pays, peu habitués à ce modèle “révolutionnaire”, ont tenté d’y reproduire le système existant.

“Le Conseil d’administration du Fonds mondial est arrivé à la conclusion qu’il fallait définir un cadre, des normes minimum et un système d’incitation, surtout dans les pays où il y a des problèmes de gouvernance”, a dit Ngom.

Conséquence du nouveau mode d’éligibilité des pays, les financements octroyés par le Fonds mondial dans le cadre de la lutte contre ces trois épidémies ne seront pas accordés ou renouvelés si les pays et leurs partenaires ne respectent pas les critères de gestion, de participation et de répartition des fonds imposés par l’organisme international

“Avec le nouveau système, on professionnalise les CCM, on guide le processus vers une veritable représentation de tous les partenaires”, a estimé Ngom.

La professionnalisation des CCM devrait aussi permettre de régler certaines lenteurs dans la mise en oeuvre des programmes, comme les systèmes d’approvisionnement (médicaments antirétroviraux [ARV  ] pour les personnes vivant avec le VIH  , moustiquaires contre le paludisme), de suivi et d’évaluation des programmes.

“On va enfin pouvoir attendre des CCM ce que l’on a toujours attendu d’eux”, a estimé Fodé Dramé, le président du CCM de Guinée. “Avant, les directives étaient floues, désormais elles se précisent et nous y voyons plus clair.”

Selon le Fonds mondial, cette nouvelle manière de concevoir l’aide internationale est un défi autant pour les pays que pour leurs partenaires, bailleurs de fonds et organisations internationales, à qui il est reproché un certain “attentisme”.

“Les partenaires ont souvent été timides”, a estimé Ngom. “Nous donnons l’argent, mais c’est aussi à eux de s’assurer qu’il est bien utilisé. Il faut agir plus en amont, et moins en ‘sapeurs pompier’”.

Certains pays ont déjà fait les frais de la détermination du Fonds mondial à mieux gérer les ressources, à commencer par le Sénégal dont le précédent financement pour la lutte contre le paludisme a été annulé cette année, faute de résultats.

Mais cette réforme était nécessaire pour éviter au Fonds mondial de perdre sa crédibilité et ainsi continuer à mobiliser les fonds de la communauté internationale, a estimé l’organisme international.

“Il était utopique de penser qu’on pouvait laisser naître les CCM comme des champignons, on est obligé d’avoir des garde-fous”, a dit Ngom. “On est en train d’ouvrir une ère de la performance”.

“Les pays vont s’asseoir, discuter et échanger leurs expériences”, a conclu Ngom. “Certaines actions peuvent être prises très rapidement et débloquer des millions de dollars”.


Publié sur OSI Bouaké le lundi 27 juin 2005

 

DANS LA MEME RUBRIQUE