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Chine / MSF avec les enfants en situation difficile

La vie des enfants vulnérables à Baoji


Mots-Clés / OEV / MSF

Site MSF   - Mis en ligne le 20 septembre 2004

En mars 2001, nous avons ouvert dans la ville de Baoji un centre d’accueil pour enfants en situation difficile. Depuis, près de 300 enfants sont passés par ce projet pilote pour tenter de se construire un avenir plus stable. Liu Kun a les rêves habituels d’une jeune fille de 17 ans : se marier, avoir des enfants, trouver un travail. Mais son parcours n’a rien de classique. Abandonnée par ses parents, élevée par son grand-père, l’adolescente a dû se débrouiller seule à la mort de ce dernier. Une année durant, elle a travaillé de force dans une usine clandestine de pilules d’ecstasy, avant de "saisir sa chance" et prendre la fuite. Après quelques mois d’errance, Liu Kun est arrivée dans notre centre pour enfants en situation difficile de Baoji, ville au centre de la Chine.

Ouvert en mars 2001, en collaboration avec le Bureau des Affaires Civiles chinoises, ce lieu veut offrir aux enfants des rues un environnement stable et propice à leur reconstruction (hébergement temporaire, soins médicaux et psychologiques, scolarisation...). Trois volontaires expatriés (un médecin, un psychiatre et une éducatrice spécialisée) et treize employés chinois (une infirmière, sept éducateurs, deux professeurs et trois travailleurs sociaux) se consacrent à ce projet pilote en Chine, pour introduire une nouvelle approche de l’aide à ces enfants marginalisés, ainsi que de nouvelles méthodes d’éducation.

ENFANTS ABANDONNES, ENFANTS FUGUEURS, ORPHELINS... Le phénomène des enfants des rues est un réel problème en Chine. Chaque année, 150.000 "actes de vagabondage" concernant des enfants de moins de 16 ans sont recensés. Seuls ou en bandes, ils mendient ou bien ramassent des bouteilles en plastique qu’ils revendent au poids pour un prix dérisoire. La faim, le froid et le rejet sont leur quotidien.

Orphelins comme Liu Kun, enfants abandonnés comme Dong Yu (lire son histoire), enfants "perdus" dans le tumulte d’un quai de gare, rejetés après un divorce, bouche de trop à nourrir, handicapés... Certains sont vendus, d’autres donnés, d’autres encore ont fugué pour échapper à des maltraitances et des abus. Parce que Baoji, dans la province du Shaanxi, est un noeud ferroviaire important, beaucoup échouent là après parfois plus de 40 heures de train.

CHINE - Témoignages d’enfants

Mis en ligne le 13 Septembre 2004

LIU KUN, 17 ANS Liu Kun, 17 ans, est arrivée au centre voici deux mois. "Je n’ai jamais connu mes parents, mon grand-père était ma seule famille. Quand il est mort, il a fallu que je me débrouille seule." Jamais scolarisée à cause d’une enfance nomade, elle a dû trouver un travail. Emmenée en bus par une connaissance vers une destination inconnue, elle atterrit dans une usine clandestine. "Nous étions quatre filles à fabriquer des petites pilules blanches mauvaises pour la santé." De l’extasy... "J’étais nourrie et j’avais un endroit où dormir, mais je n’ai jamais touché un salaire, parfois celui qui nous dirigeait nous insultait, nous disait que nous n’étions rien." Lorsqu’elle manifestait son désir de partir, Liu Kun était menacée de mort. "Au bout d’un an, j’ai décidé de m’enfuir, je n’avais aucun plan, j’ai juste saisi ma chance...". Depuis son arrivée au centre, Liu Kun se montre très réservée. "Je n’aime pas parler avec les autres enfants, je préfère garder mes pensées pour moi." Mais elle peut à nouveau avoir des rêves d’adolescente. "Plus tard, j’aimerais trouver un travail, me marier et avoir des enfants."

DONG YU, 8 ANS "Je suis arrivé vendredi dernier, je suis content d’être ici." Dong Yu n’a que 8 ans, mais a déjà connu la vie dans la rue. Ses parents ont divorcé quand il était tout petit, et il est resté vivre avec son père. Lorsque ce dernier s’est remarié, sa belle-mère, déjà mère d’un garçon, ne voulait pas de lui. "Ils me traitaient mal, me frappaient. Un jour ils ont dit qu’ils n’avaient pas assez d’argent pour me garder, alors mon père m’a abandonné dans la rue." La vie d’enfant des rues a commencé : la faim, le froid, la solitude, le ramassage des bouteilles pour gagner quelques yuans, la charité occasionnelle des passants. Jusqu’à ce qu’un policier le ramasse et qu’il soit amené au centre. "J’aime ma vie ici, jouer avec les autres enfants, aller à l’école... Quand je serai grand j’aurai une bonne situation, pour cela il faut que je travaille bien !" L’espoir revient.

ZHONG LEI LEI, 12 ANS "Je ne sais pas par où commencer le récit de mon histoire : avant la rue ? Avant que ma mère ne quitte la maison ? C’est si long et si compliqué..." Zhong Lei Lei et sa petite soeur avaient une enfance heureuse. C’était avant que son père se mette à jouer au mah-jong et à battre sa mère. Avant que sa mère ne supporte plus les coups et décide de partir. Elle avait 7 ans. "Un mois plus tard, mon père nous a jetées dehors. "Avec sa soeur, elles errent alors dans les rues pendant de longues semaines, dormant sous les porches d’immeubles. Ramassées par la police, elles sont alors envoyées dans un premier centre pour enfants des rues. "Puis une famille nous a accueillies, mais ils n’étaient pas gentils avec nous, ils nous criaient dessus et nous battaient." En juin 2004, elles sont finalement amenées au centre de Médecins Sans Frontières à Baoji. "J’aime la vie ici. Cela fait longtemps que je n’ai pas été à l’école, j’ai hâte d’y retourner ! Et quand je serai grande, j’ouvrirai un centre pour enfants comme ici", rêve Zhong Lei Lei.


Publié sur OSI Bouaké le dimanche 24 avril 2005

 

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