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Areva mis en cause par WikiLeaks pour le traitement de ses employés en Centrafrique



Le Monde - Cyril Bensimon et Joan Tilouine - 5 Février 2016 - Exclusivement consacrés à la République centrafricaine (RCA), les derniers documents révélés par WikiLeaks, vendredi 5 février, dessinent à grands traits les relations commerciales entre un Etat déliquescent, corrompu, et des entreprises étrangères aimantées par les richesses de son sous-sol. Sont pointées une société d’Etat chinoise, Poly Technologies, présentée comme un acteur majeur de la vente d’armements, ainsi qu’une junior pétrolière sud-africaine, Dig Oil, attirées par les réserves d’or noir centrafricain, ou bien encore ce qui s’apparente à une tentative d’escroquerie montée par une fausse ONG, l’Alliance mondiale des sports.

Dans ces fuites, Areva est également épinglé pour la manière dont l’entreprise a interrompu ses activités en 2012 et quitté le pays. Déjà sous enquête judiciaire suite au rachat hautement surévalué, cinq ans plus tôt, d’UraMin – la société qui lui a notamment revendu le permis d’exploiter le gisement centrafricain de Bakouma –, le géant français du nucléaire est accusé d’avoir mis en danger son personnel local avant de plier bagage.

Selon un rapport, non daté et non signé, à en-tête de la présidence centrafricaine, rédigé par un comité composé de représentants de l’administration locale, de délégués du personnel d’Areva et d’un médecin radiologue, « les foreurs, aides foreurs et agents de laboratoire qui sont censés être en contact avec les roches minéralisées en uranium ne disposaient d’aucun moyen de protection, ni n’étaient sensibilisés sur les mesures de radioprotection pendant leurs activités ». Sur le site de Bakouma, « le traitement des carottes [les échantillons de terre prélevés] se faisait à mains nues et sans aucune protection » et « les employés locaux ne disposaient pas de dosimètre individuel alors qu’ils étaient exposés aux radiations ».

Areva n’aurait donc pris, au préalable, aucune des mesures élémentaires pour protéger ses travailleurs. Une fois sa décision de suspendre ses activités actée, l’entreprise se serait également employée à obstruer le travail du comité chargé d’enquêter sur ces questions. « Les demandes des dossiers de suivi médical et dosimétrique du personnel sont demeurées sans réponses » et « les données indispensables dont le comité a besoin ont été soit détruites, soit dissimulées par Areva, qui a procédé volontairement au formatage des disques durs de tous les ordinateurs sur le site, au verrouillage du serveur et a emporté toute la documentation existante avant l’arrivée du comité sur le site », peut-on lire dans le rapport de trente pages.

« Il n’y a pas d’enjeu sanitaire »

Areva a quitté la RCA en 2012, arguant notamment de « la morosité du marché de l’uranium » après la catastrophe de Fukushima et de « l’impossibilité de la poursuite des activités liées à un climat d’insécurité permanent causé par l’attaque du site le 24 juin 2012 ». La Centrafrique entamait alors son plongeon dans une guerre dont elle ne s’est toujours pas extirpée.

Aux accusations contenues dans ce document publié par WikiLeaks, Areva rétorque que « les employés du site avaient des tenues de travail adaptées et bénéficiaient de sensibilisations régulières aux enjeux de sécurité », qu’elle avait « mis en place un suivi radiologique des salariés, dont les résultats étaient suivis par le médecin », que « les doses moyennes reçues par les salariés entre 2009 et 2011 étaient largement inférieures à la limite centrafricaine et internationale » et donc qu’« il n’y a pas d’enjeu sanitaire, compte tenu des usages locaux et de la distance entre le site et les zones d’habitat ».


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Publié sur OSI Bouaké le samedi 6 août 2016

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