Afrique du sud : Qui surveille le plus vaste programme de distribution d’ARV au monde ?

Publié le 29 juin 2010 sur OSIBouaké.org

Johannesbourg, 28 juin 2010 (PLUSNEWS) - Le plus vaste programme de distribution d’antirétroviraux (ARV  ) au monde pourrait opérer dans le noir, selon les résultats d’une étude très attendue sur le plan stratégique national de lutte contre le VIH  /SIDA   (NSP en anglais), publiés par le Conseil national sud-africain de lutte contre le sida   (SANAC en anglais).

Certains résultats sont positifs. Par exemple, l’ébauche préliminaire élaborée par le SANAC indique que depuis le lancement du NSP en 2007, l’usage du préservatif a doublé, que le nombre d’adultes séropositifs sous traitement ARV   a presque triplé et que 76 pour cent des femmes enceintes séropositives ont accès aux services de prévention de la transmission du VIH   de la mère à l’enfant (PTME  ).

D’autres sont moins glorieux. En effet, l’accès à la bithérapie antirétrovirale dans le cadre de la PTME   pose problème et compte tenu du manque de suivi et d’évaluation, les décideurs pourraient opérer dans le vide, peut-on lire dans le rapport.

Mark Heywood, président-adjoint du SANAC, n’a pas été surpris par de tels résultats.

« Selon moi, le message à retenir est le suivant : les politiques sont bonnes, mais leur mise en ouvre demeure médiocre. Nous devons concentrer nos efforts sur la mise en ouvre et l’efficacité », a-t-il déclaré.

L’élaboration d’un nouveau NSP n’a pas encore débuté, mais M. Heywood a précisé que le plan actuel se poursuivrait jusqu’à la mi-2011. Le pays dispose ainsi d’une année complète pour formuler un nouveau plan et concentrer ses efforts notamment sur le programme national de conseil et de dépistage volontaire, lancé récemment et qui en est à ses balbutiements.

L’Afrique du Sud mène probablement le plus vaste programme de distribution d’ARV   au monde : plus de 700 000 personnes reçoivent des ARV   auprès d’établissements publics.

La bithérapie mise à mal par des manques de financement

Le programme national de conseil et de dépistage volontaire n’est pas le seul projet à en être à ses balbutiements. En effet, la bithérapie antirétrovirale dans le cadre de la PTME  , selon laquelle les mères séropositives et leurs nouveaux-nés reçoivent une combinaison de deux médicaments (névirapine et zidovudine), a été introduite en Afrique du Sud en 2008. La bithérapie se révèle plus efficace que l’ancien traitement qui préconisait l’administration d’une seule dose de névirapine, et peut réduire les risques de transmission du VIH   de la mère à l’enfant jusqu’à cinq pour cent.

Bien que les provinces aient adopté la bithérapie et qu’il existe des travailleurs sanitaires dûment formés afin de prescrire le traitement, certains districts continuent d’administrer une seule dose de névirapine aux mères et aux bébés, car trouver les fonds pour acheter les doses de névirapine et zidovudine constitue un défi, souligne le rapport.

L’étude de 452 pages met également l’accent sur le manque de données relatives aux bébés nés avec le virus. Cependant, selon les chiffres avancés par le ministère de la Santé, près de 40 pour cent des nourrissons exposés aux dangers du VIH   courraient le risque de contracter le virus en raison de services de PTME   insuffisants.

Le flou du suivi et de l’évaluation

Toujours selon le rapport, les données insuffisantes sur les mères, les nouveaux-nés et les patients séropositifs en attente de traitement ne constituent que la partie émergée de l’iceberg. Le NSP actuel s’était fixé 17 buts et 65 objectifs, et il devait mener à bien un enchevêtrement de 300 interventions. En outre, 35 « indicateurs primaires » n’ont pas été pris en compte dans les plans nationaux de lutte contre le VIH  , notamment ceux en lien avec la réduction de la pauvreté et l’accès à l’eau potable.

Compte tenu de la multitude de buts et d’objectifs, il est difficile de mesurer les succès remportés par l’Afrique du Sud. Une foule d’information sur le VIH  /SIDA   est recueillie afin de répondre aux exigences en matière d’établissement de rapports du gouvernement. Toutefois, les différences au niveau de la qualité, de l’envergure et de la disponibilité ont lancé des défis de taille à ceux qui essayaient de mettre en ouvre des interventions de lutte contre le VIH   fondées sur des données probantes.

Des points faibles similaires en matière de suivi et d’évaluation ont été également soulevés dans le Rapport consolidé de l’équipe de soutien intégré du gouvernement (Integrated Support Team (IST) Consolidated Report), commandité par l’ancienne ministre de la Santé Barbara Hogan, en réponse à la pénurie d’ARV   dans la province de Free State en 2009.

L’équipe a noté qu’une profusion de modèles de rapport et des requêtes d’information parallèles avaient entraîné une « lassitude à l’égard du recueil d’informations » et une baisse de la qualité.

Ronel Visser, directrice de Health Link, la branche chargée de la gestion de l’information ainsi que du suivi et de l’évaluation de Health Systems Trust, un organisme de recherche, a estimé que l’Afrique du Sud avait accompli de gros progrès, notamment en ce qui concerne la simplification des exigences en matière d’établissement de rapports.

Toutefois, des emplois en gestion de l’information non pourvus, une incapacité à mettre en place des logiciels et des systèmes de technologie de l’information dans bon nombre d’établissements et des professionnels de la santé surchargés auxquels on confie la tâche supplémentaire de recueillir des données sont autant de facteurs ayant entraîné un manque de capacités en suivi et évaluation.

Mme Visser a déclaré que combler ces lacunes prendrait du temps. Toutefois, elle garde espoir : le gouvernement est conscient du problème et le SANAC a appelé à la mise en place d’un système de gestion de l’information qui permettrait le recueil quotidien de données au premier échelon du système de santé.

« Le VIH   est une maladie complexe qui requiert un système de gestion de l’information capable de suivre la gestion de maladie de chaque patient », a-t-elle dit à IRIN/PlusNews.

L’étude exige de la part du SANAC et des conseils provinciaux de lutte contre l’épidémie une capacité accrue en matière de suivi et d’évaluation. Elle appelle également à la création d’un seul système multi-sectoriel d’établissement de rapports géré par le SANAC afin d’améliorer la qualité de l’information relative à la planification et à la gestion, dans le but de combattre la maladie.

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