Z n°3 : Usines en lutte, organisations ouvrières

Publié le 4 avril 2010 sur OSIBouaké.org

Revue Z - 2 avril 2010

Après un automne sur les routes du Nord, le numéro 3 de Z sort des presses.

Il rend compte des combats ouvriers rencontrés à Amiens et ses alentours, pose la question de l’autogestion, mais aussi celle de la production et de ses finalités.

Au cœur de notre itinérance en Picardie  : des ouvriers qui se battent dans une région frappée par la désindustrialisation. Goodyear, Dunlop, Manufacture française de sièges, Continental... Autant d’usines à Amiens et ses alentours dans lesquelles nous avons rencontré ceux qui refusent de baisser la tête. Souvent sans aucun soutien des confédérations syndicales, ces travailleurs se démènent pour le maintien de leur emploi, contre de nouvelles cadences ou pour arracher de conséquentes indemnités de licenciement.

De prime abord défensives, ces luttes n’incarnent-elles que l’image d’un monde ouvrier désabusé, réduit à parer les coups du management moderne et des «  lois  » de l’économie  ?

Nous avons eu un autre sentiment  : loin d’être le reflet d’un simple sursaut de dignité ponctuel et évanescent, ces mouvements ouvriers ouvrent des possibles – ici et là.

Également au sommaire de ce Z n°3 :

  • un dossier sur la fièvre catharrale ovine (FCO) qui donne la parole à des bergers en colère,
  • un reportage sur la lutte des Kurdes contre les barrages hydrauliques turcs,
  • un retour chronologique sur le fiasco des débats publics au sujet des nanotechnologies
  • un reportage sur les hortillonages d’Amiens (ces jardins potagers autogérés – ou pas),
  • une enquête sur les puces RFID dans les transports en commun de Lille,
  • un photo-reportage sur les migrants de Calais,
  • un entretien imaginaire avec un millénariste du XVe siècle... et bien d’autres surprises !

(Sommaire complet ci-dessous)

Z - Numéro 3 - Amiens - Printemps 2010 - 192 pages - 2 couleurs - 10 euros - Disponible en librairie ou sur commande www.zite.fr

Plus que jamais, Z invite ses lecteurs à participer à ses aventures : nous partons ce lundi 5 avril pour Nantes et allons y rester plus d’un mois... Discuter, rencontrer, enquêter sur les questions de capitalisme vert, d’écologie radicale, de contrôle verdoyant... Si vous voulez écrire, dessiner, photographier, maquetter, graphiquer, imprimer, etc., avec nous, écrivez-nous à :

Z - c/o La parole errante - 9, rue François Debergue 93100 Montreuil - Email : contact@zite.fr


Sommaire du N°3

Reportage / TIRS DE BARRAGE AU KURDISTAN De l’utilisation politique des barrages hydrauliques A l’automne 2009, nous sommes partis en Turquie, à la rencontre des Kurdes luttant contre la construction de grands barrages hydrauliques qui défigurent leurs terres. Pour eux, ces barrages sont un outil parmi d’autres utilisés par l’état turc pour asseoir son contrôle sur une région qui lui échappe.

Photo-reportage / AUTRES KURDES, ENTRE-TEMPS Prises en Irak par Bruno Barbey lors de deux reportages réalisés en 1974 et 1991, ces photographies saisissent deux moments de l’histoire des kurdes. Au coeur d’une situation géopolitique instable, les exodes de ce peuple morcelé sont fréquents.

Action et analyse / NANOTECHNOLOGIES : DEBACLES ET POUSSIERES Un organe étatique d’acceptabilité mis en place pour nous faire bouffer les nanos. Une série de réunions de propagande à travers la France. Des mois de contestation où, dans leur ville, les opposants sabotent des débats de plus en plus fliqués. Pour nous, reposer une véritable question  : celle du refus de la domination scientifique et gestionnaire de la vie.

Espionnage / LEÇON D’ACCEPTABILITÉ DÉCOMPLEXÉE Ce n’est pas une vue de l’esprit. La campagne de la CNDP était tout sauf une remise en cause démocratique du nanomonde. Pour preuve, quand des sociologues d’État font le point, entre eux, sur les débats organisés en France et à l’étranger, personne n’ose dissimuler l’enjeu premier de toutes ces réunions publiques  : faire accepter les nanotechnologies.

Technopolitique / LILLe, MÉTROPOLE UBIQUITAIRE Par tomjo, rédacteur à La Brique Tous pucés, tout pucé. Une puce électronique pour un oui, pour un non. Une puce à la bibliothèque, une dans les transports en commun, une à l’université et une autre au supermarché. Des clients géolocalisés, des pubs ciblées en fonction de leurs trajets, de leurs regards, de leurs habitudes d’achat. Et pourquoi pas une seule puce pour tout ça ? Directement implantée dans le cerveau ? Ce sera bientôt plus que pratique  : in-dis-pen-sable ! Voilà le meilleur des mondes qu’on nous construit à Lille.

Bande dessinée / VOYAGER SANS TIQUER Sur les mutuelles de fraudeurs dans les transports en commun

Reportage / JUNGLES URBAINES ET QUADRILLAGES HORTICOLES Les hortillonnages sont une spécialité amiénoise vieille et vivante de quelques siècles. Îlots de culture maraîchère sur des marécages peu à peu encerclés et gangrénés par l’urbanisation, ils sont peut-être un phénomène original de communauté paysanne. Une réserve d’Indiens au milieu d’un champ de cow-boys.

SEQUENCE : USINES PLOMBÉES, TUYAUX DE LUTTE et PRODUCTION DÉVIÉE

Au cœur de notre itinérance en Picardie  : des ouvriers qui se battent dans une région frappée par la désindustrialisation. Goodyear, Dunlop, Manufacture française de sièges, Continental... autant d’usines à Amiens et ses alentours dans lesquelles nous avons rencontré ceux qui refusent de baisser la tête. Souvent sans aucun soutien des confédérations syndicales, ces travailleurs se démènent pour le maintien de leur emploi, contre de nouvelles cadences ou pour arracher de conséquentes primes de licenciement. De prime abord défensives, ces luttes n’incarnent-elles que l’image d’un monde ouvrier désabusé, réduit à parer les coups du management moderne et des «  lois  » de l’économie  ? Nous avons eu un autre sentiment  : loin d’être le reflet d’un simple sursaut de dignité ponctuel et évanescent, ces mouvements ouvrent des possibles – ici et là. Dans ce dossier, pas de réponse prophétique, mais le désir impérieux de rencontrer ce monde en lutte, ce qui l’anime, ses questions. L’envie aussi de confronter les combats d’aujourd’hui à la puissance des expériences passées. Au pied des usines plombées, partager quelques tuyaux de lutte et s’interroger sur les moyens de dévier la production.

Reportage dans les usines en lutte d’Amiens et ses alentours / LA BASE SE REBIFFE Drôle de pays, la Picardie. Plantées au milieu des champs de betteraves, des usines ferment à tour de bras, des syndicalistes dissidents conspuent leurs grands chefs, et des médias en mal d’histoires viennent y annoncer encore une fois la fin du monde ouvrier. En nous installant pendant deux mois sur cette plate terre, nous cherchions à en savoir plus sur ce qui anime aujourd’hui la classe ouvrière au moment où les annonces de licenciements se multiplient. Mettant à mal nos préjugés et nos fantasmes, nous avons partagé, avec ceux qui subissent de plein fouet la désindustrialisation française en cours, des moments de lutte riches en enseignements. De Continental à Dunlop, en passant par Goodyear et Manufacture française de sièges, de désillusions en victoires, c’est à chaque fois la dignité et la solidarité qui se construisent parmi ceux qui, face au cynisme et au dédain du gouvernement, du patronat ou des centrales syndicales, refusent de baisser la tête.

Témoignages et portraits / LES FORÇATS DU PNEU A Amiens, les usines ne produisent pas que des luttes. Au cours de son itinérance, Z a rencontré des ouvriers combatifs, mais aussi des hommes combattus. Des gueules cassées, des corps en vrac, des devenirs amputés – voilà l’une des autres «  productions  » de l’usine. Souvent écœurés et parfois révoltés, les ouvriers de Goodyear et de Dunlop nous livrent ici des morceaux de leur quotidien à l’atelier. Six témoignages, six portraits, qui ponctuent ce dossier sur les luttes au travail. Des corps à l’envers, l’envers du décor.

Palabres / L’IMAGINATION SANS LE POUVOIR Luttes d’hier et d’aujourd’hui, discussion laborieuse à l’université populaire d’Amiens. Plus d’un mois après la fin de son itinérance en Picardie, Z s’est invité au débat organisé par l’Université populaire d’Amiens* autour du film Lip, l’imagination au pouvoir, de Christian Rouaud. Des délégués syndicaux d’usines aujourd’hui en lutte ont répondu à l’appel, mais aussi Charles Piaget, ancien délégué CFDT et pilier du mouvement des Lips. Que s’est-il passé dans cette usine pour que, plus de trente ans après, son récit soit encore sollicité  ? En 1973, après l’annonce de nombreux licenciements, les ouvriers horlogers de Besançon avaient pris le contrôle de la production, défiant l’autorité des confédérations syndicales nationales. Très vite leur combat a attiré l’attention  : non seulement ils relançaient la fabrication de montres, mais ils les vendaient et se payaient. Une aventure autogestionnaire de plusieurs mois inédite en France. Elle reste depuis le symbole d’un mouvement victorieux. Confronter cette expérience à celle de mouvements en cours, en évoquant leurs forces, leurs difficultés, mais aussi leurs limites, semble donc particulièrement pertinent. Cependant, à ses risques et périls, Z a tenu à poser une question qui nous tient à cœur. Celle de la production et de ses finalités. De quoi s’attirer les foudres de leaders syndicaux engagés dans des luttes qui ont pour axe central le maintien des emplois et de la production actuels...

Action et analyse / DES OUVRIERS DÉMORALISENT LES « LOIS » DE L’ÉCONOMIE A propos de l’expérience autogestionnaire des ouvriers de Philips à Dreux Par T. G. et B. B., rédacteurs au Sabot Le 14 janvier 2010, deux rédacteurs du Sabot * se sont rendus à l’usine Philips-EGP de Dreux en Eure-et-Loir, dans laquelle on assemble des téléviseurs à écran plasma, et où, disait-on, les ouvriers en lutte avaient lancé le contrôle ouvrier de la production. Voici quelques réflexions après une demi-journée passée dans l’usine, un peu d’attention sur ce qui a pu se dire à propos de cet évènement et comment celui-ci nous semble entrer en résonance avec nos interrogations actuelles.

Réflexions / UN BON VIEUX CONSEIL D’OUVRIERS Entre la disparition prétendue de la classe ouvrière et la diffusion de l’organisation bureaucratique à toutes les sphères de la société, reste-t-il encore une place pour la démocratie directe et l’autogestion  ? Quelques éléments de réponse dans cette réflexion autour de l’expérience des conseils ouvriers.

Récit de lutte / WORKING CLASS HEROES Des ouvriers britanniques détournent une usine d’armement Dans les années 1970, le groupe anglais Lucas Aerospace était l’un des principaux constructeurs européens de composants et de systèmes destinés à l’aviation civile et militaire. Il produisait notamment les équipements destinés aux missiles Sting Ray utilisés par les troupes de l’Otan, et comptait environ 18 000 salariés répartis sur 13 sites. En 1973, menacés par un plan de restructuration prévoyant la suppression de 2000 emplois, les salariés de Lucas Aerospace ont créé un collectif d’un genre très particulier. Le groupe, qui rassemblait ouvriers, scientifiques et ingénieurs issus de l’ensemble des sites de l’entreprise, s’est consacré plusieurs années durant à un projet de production alternative  : le Projet Lucas. Il consistait à inventer des produits utiles au plus grand nombre – systèmes de transports en commun, de chauffage et d’habitat bon marché et écologiques... – tout en élaborant des technologies de production favorisant la créativité des travailleurs et compatibles avec une organisation du travail non-hiérarchisée.

Enquête / PIEDS DE NEZ A L’USINE Resquilles, débines et autres micro-résistances ouvrières S’ils peuvent paraître anecdotiques, les arrangements avec la règlementation, les libertés prises avec les horaires et tous les petits refus dans l’atelier n’en sont pas moins révélateurs. Ils manifestent l’existence d’une micro-politique spécifiquement ouvrière dont le potentiel en termes d’action collective est souvent mal perçu. Du contournement des réglementations à l’esquive des disciplines, récit d’un quotidien en résistance.

SABOTER LE TRAIN TRAIN DU TRAVAIL / Cartographie

Analyse / TRAVAIL ADHÉSIF ET COURT-CIRCUITS Pour assujettir les travailleurs modernes, les sociétés capitalistes ne se contentent plus des anciennes disciplines et des nouveaux contrôles. Elles doivent aussi jouer sur la corde sensible et déployer des justifications à la mesure de la soumission escomptée. Consolidé par les critiques qui lui sont adressées, en les intégrant dans des modes de travail sans cesse renouvelés, ce système cherche à renforcer le consentement nécessaire à son maintien. Nous serions contraints de nous réjouir de cette autoroute mortifère, la seule viable. Reconnaissants envers le droit d’élire un président, de nous déplacer en un temps éclair et d’accéder aux soins et à l’éducation, notre adhésion devrait être sans faille. Certains parlent alors de servitude volontaire. Pourtant, même si elles restent souvent éparpillées et sans écho, des résistances, des colères et des luttes surgissent continuellement. Comment faire pour que ces combats puissent dépasser l’urgence et l’esquive  ? Nous jetons ici quelques pierres pour tracer des chemins en dehors du contrôle machinique et de la vie strandardisée.

Correspondance / PERDRE SA VIE A LA GAGNER En décembre 2009, Pierre nous avait permis de monter dans sa tour d’aiguillage à Longueau, près d’Amiens. C’était quelques jours avant qu’elle ne ferme, remplacé par un PAI (Poste d’aiguillage informatisé). Adieu les oiseaux, la vue embrumée sur le lac et l’horizon pour rêvasser. Adieu les manettes et les arbres à cames, remplacés par des ordinateurs. Adieu aussi à la tranquilité  : les PAI regroupent tous les agents du secteur sous le regard d’un superviseur, dans une salle en rez-de-chaussée, sans vue directe sur les lignes. Pierre pouvait s’en foutre, il était à deux mois de la retraite... Mais les nouveaux... Il leur a écrit et remis cette lettre.

DESSEINS D’HYBRIDES / Galerie d’humanimaux

DOSSIER : LES VACCINS DE LA COLÈRE «  La gestion sanitaire de l’épidémie de fièvre catarrhale ovine  » (FCO). Derrière cette formule qui fleure bon l’administration du vivant, se joue rien moins que l’avenir d’une certaine idée de l’agriculture. Tandis qu’une énième croisade sanitaire continue de déposséder les éleveurs de la maîtrise des soins à leurs bêtes, les instances de cogestion agricole exercent quant à elles un contrôle toujours plus poussé des cheptels. Des premières vagues de l’industrialisation à marche forcée, jusqu’aux dernières «  innovations technologiques  » poursuivant l’informatisation de la moindre brebis, les troupeaux élevés en dehors des circuits productivistes se retrouvent maintenant porteurs de tous les risques, vecteurs de tous les dangers. Après avoir dénoncé le puçage électronique des bêtes dans son premier numéro, Z se penche sur une autre campagne, rondement orchestrée par l’état et les industries pharmaceutiques, selon qui l’obligation de vacciner serait l’unique solution pour sauver les ruminants menacés. Rencontrés en Provence, en Ariège, dans l’Aveyron ou encore en Bretagne, Z donne la parole à des bergers remontés contre cette politique sanitaire globale qui rend, ici et là, l’agriculture malade.

Photoreportage / LES SISYPHES DE L’EXIL Entre janvier et mai 2008, j’ai vécu avec les migrants de Calais. Derrière les projecteurs du trash et du misérabilisme, des hommes et des femmes rafistolent leur vie, du moins ce qu’il en reste. Des images, un récit.

Histoire de comptoir / DARK TABOR Pourquoi les pragois pratiquent-ils la défenestration politique  ? Peut-on être chrétien, abolir la propriété privée, le travail et la hiérarchie, tout en vivant nus dans le libertinage le plus-total, sans être promis au bûcher et se prendre quelque croisade sur le coin de la gueule  ? Faut-il boire le Sang du Christ tous les dimanches en plus de manger son corps  ? La réponse à toutes ces questions, et à bien d’autres encore, dans cet entretien exclusif, réalisé au xxie siècle avec un homme du xve, Janek K., le dernier des Taborites – rencontré au comptoir du Longchamp de Saint-Cloud.

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