Après le report des élections, la Côte d’Ivoire de nouveau en crise

Publié le 14 février 2010 sur OSIBouaké.org

Rue 89 | Par Catherine Fiankan-Bokonga | Infosud | 13/02/2010

Le Président ivoirien Laurent Gbagbo a annoncé vendredi la dissolution du gouvernement, et en même temps celle de la Commission électorale indépendante (CEI), annulant de fait le scrutin présidentiel prévu en mars 2010 et sans cesse reporté depuis cinq ans. Le pays est menacé d’une nouvelle crise, comme l’expliquent nos partenaires de Tribune des droits humains.

Depuis 2005, date de la fin du mandat du Président Laurent Gbagbo, la Côte d’Ivoire attend l’organisation d’une élection présidentielle. La communauté internationale perd patience. Le peuple aussi.

Le Président de la Côte d’Ivoire semble avoir atteint les limites de son jeu qui lui a permis de se maintenir au pouvoir en exacerbant les questions d’identité nationale (ivoirité), les tensions religieuses et tribales entre le Nord et le Sud du pays.

Ces tensions également utilisées par ses opposants ont provoqué pour la sixième fois le report de l’élection présidentielle. Ban Ki-moon, patron de l’ONU  , a aussitôt réagi :

« Il est vital que les acteurs politiques ivoiriens respectent leur engagement d’organiser l’élection avant fin mars 2010. »

Des propos renforcés par la déclaration du président de la Banque mondiale, Robert Zoellick :

« Tant qu’on n’aura pas réglé les problèmes politiques et électoraux, il sera difficile d’attirer les investisseurs. Car la réussite des élections présidentielle et législatives à venir sera une raison déterminante pour éponger le reste de la dette ivoirienne. »

Après une traversée du désert en matière d’aide internationale (depuis le putsch de 1999), la Côte d’Ivoire avait normalisé ses relations avec les grandes institutions internationales. La tentative de coup d’État de septembre 2002 a replongé le pays dans l’instabilité.

Déclin économique de la Côte d’Ivoire

Cette nouvelle période de troubles civils liés à l’occupation du Nord du territoire par une rébellion armée ont entraîné un déclin économique et une aggravation de la pauvreté qui est passée de 38,2% en 2002 à 48,9% en 2008. En 2007, le pays était classé à la 166e position (sur 177 pays) de l’indice de développement des Nations unies.

D’où son éligibilité, déterminée par le FMI et la Banque mondiale, au programme des pays pauvres très endettés (PPTE) depuis 2008. La Côte d’Ivoire a ainsi déjà reçu près de la moitié de son allégement (près de 1,5 milliard de dollars) sur une dette publique extérieure estimée à 14,3 milliards de dollars fin décembre 2007.

Début 2009, le FMI lui a accordé un prêt préférentiel de 565 millions de dollars sur trois ans dans le cadre de sa Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC). Son président, Dominique Strauss-Kahn, avait déclaré en mai 2009 que « la tenue des élections ne doit pas mettre en péril les programmes économiques ».

Risque de « guerre civile »

Reste à savoir comment la « pierre angulaire de l’Afrique de l’Ouest » va éviter une nouvelle crise politique. L’actuel climat de suspicion, de délation et de lassitude entourant le contentieux de l’inscription sur les listes électorales pousse les Ivoiriens à des actes de plus en plus violents.

L’ONU   et le Premier ministre et ex-chef de la rébellion, Guillaume Soro, ont lancé un appel au calme. Le porte-parole de l’ex-rébellion, Sidiki Konaté, également ministre du Tourisme, a mis en garde contre un risque de « guerre civile. C’est le Rwanda qui se prépare ». Une perspective qui menace aussi de déstabiliser les États voisins, tributaires de la santé économique de la Côte d’Ivoire.

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