La définition de la notion « enfants soldats » en plein débat au procès Lubanga

Publié le 9 février 2010 sur OSIBouaké.org

22 janvier 2010 par Bukeni T. Waruzi, expert sur la question des enfants soldats et Coordinateur de programme pour l’Afrique et le Moyen-Orient - WITNESS

La reprise le 7 janvier du procès contre Thomas Lubanga à la Cour pénale internationale (CPI  ) a été marquée par le témoignage de Radhika Coomaraswamy, Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU   pour les enfants dans les conflits armés. Celle-ci a rappelé que, s’agissant de l’interprétation de la notion d’enfants soldats, il était important de ne pas faire de distinction entre les enfants qui ont activement participé aux hostilités et ceux qui ont joué un rôle indirect. « Les filles ont joué de nombreux rôles, y compris ceux de combattants, de porteurs, d’éclaireurs mais aussi d’esclaves sexuelles et “d’épouses de la jungle”… nous devons attirer l’attention sur les rôles que les filles ont joué et la nécessité de les protéger dans toutes les situations », a-t-elle souligné.

village_screening1La question des enfants soldats, qui est l’élément central du premier procès de la Cour, est très complexe et démontre l’existence d’un fossé entre la nature de la pratique d’enfants soldats et les règles et procédures de la justice internationale et de la Cour pénale internationale.

La notion d’ « enfants soldats » n’est pas nouvelle, elle date depuis près d’un siècle.

Selon le protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, la définition du terme « enfant soldat » - reconnue par les experts en la matière - stipule : « toute personne de moins de dix-huit ans qui fait partie d’une quelconque force armée ou d’un quelconque groupe armé, officiel ou non, en quelque qualité que ce soit - notamment, mais non exclusivement en tant que combattant, cuisinier, porteur, messager ou tout accompagnateur de tels groupes, autre que des membres de la famille. Cette définition comprend également les filles recrutées à des fins sexuelles ou pour un mariage forcé. Elle ne se limite donc pas seulement aux enfants qui portent ou ont porté des armes ».

De plus, l’utilisation de la notion d’”enfants associés aux forces et groupes armés” vise à inclure non seulement les enfants soldats mais aussi tous les enfants qui sont directement ou indirectement impliqués dans les activités de ces groupes et forces armées. Mais cette notion n’est pas reprise dans le Statut de Rome. En effet, bien que l’utilisation d’enfants soldats soit reconnue comme crime de guerre dans l’article 8 du Statut de Rome, sa définition n’indique pas les autres catégories d’enfants soldats qui ne participent pas « activement aux hostilités ».

Il est vrai que les enfants servent dans les groupes et forces armées de différentes manières : soldats au front, gardes du corps, informateurs, sorciers, cuisiniers, etc. Certains peuvent être formés à entreprendre plusieurs tâches à la fois (par ex. combattant et cuisinier) tandis que pour un nombre limité d’entre eux, leur rôle se restreint à une fonction (par ex. esclave sexuel). Le recrutement des enfants soldats a plusieurs mobiles, dont entre autres l’utilisation sexuelle pour les filles.

C’est pourquoi, en pratique, la distinction entre participation active ou non aux hostilités est exceptionnelle et très rare, puisque il est très difficile de trouver un enfant dans un groupe ou une force armée qui ne peut pas être soldat.

Compte tenu de la complexité de la question et de la nature de la notion d’enfants soldats, La discussion devrait être placée plus dans le cadre pratique que théorique.

Bukeni T. Waruzi,

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