Ouganda : La fermeture des camps inquiète les personnes déplacées vivant avec le VIH

Publié le 31 octobre 2009 sur OSIBouaké.org

Gulu, 15 octobre 2009 (PLUSNEWS) - La fermeture imminente des camps de déplacés dans le nord de l’Ouganda suscite des inquiétudes parmi les résidents séropositifs, qui craignent de ne pas avoir accès aux services de santé vitaux lorsqu’ils seront rentrés dans leurs villages.

Le démantèlement des camps de déplacés a débuté dans la région le 1 octobre, et six camps du district de Gulu ont déjà été fermés. Les camps ont hébergé plus d’un million de personnes durant les 20 années de guerre entre le gouvernement et les rebelles de l’Armée de résistance du seigneur ; suite à des négociations de paix entre les parties, et à plus de deux années de sécurité durable dans la région, la décision de fermer les camps a été accélérée.

« Je ne sais pas ce qui va se passer pour certains d’entre nous, qui sommes sous ARV   [traitements antirétroviraux] ; on ne nous dit pas où nous pourrons nous procurer les médicaments une fois que nous serons dans nos villages », a dit Joseph Ochieng*, qui vivait dans le camp de Bobi, dans le district de Gulu, jusqu’à sa fermeture récente.

Absence de services dans les villages de retour

« Les villages de retour ne sont pas équipés de centres de santé ou de distribution de ces médicaments », a dit Jane Atimango*, une autre ancienne déplacée. « Nous n’avons pas d’autre choix que de parcourir de longues distances pour nous procurer nos traitements. »

Les organisations travaillant sur le VIH   craignent également que le suivi de leurs bénéficiaires ne devienne plus difficile une fois que ceux-ci seront dispersés dans des endroits où ils n’auront pas facilement accès à des centres de santé.

« Dans les camps, les installations étaient largement suffisantes, mais maintenant que nous sommes éparpillés dans les villages, nous devons nous déplacer pour bénéficier d’un suivi adapté », a dit Louis Okello, représentant des personnes vivant avec le VIH   dans le sous-comté de Patiko, dans le district de Gulu.

Des services de prévention sont également nécessaires. Une étude récente du AIDS, Security and Conflict Research Hub (Plate-forme de recherche sur le sida  , la sécurité et les conflits), montre que le passage de l’état de guerre à l’état de paix augmente les risques de transmission du VIH   car les réfugiés rentrent chez eux, les soldats quittent l’armée, les agences humanitaires réduisent leur intervention, et la croissance économique s’accélère autour des centres urbains importants.

D’après le ministère de la Santé, la prévalence du VIH   dans la région du centre-nord de l’Ouganda est d’un peu plus de huit pour cent, un chiffre plus élevé que la moyenne nationale, qui est de 6,4 pour cent.

Les membres du gouvernement affirment qu’ils prévoient de développer les services de santé au niveau communautaire en construisant de nouveaux centres de santé et en améliorant les capacités des installations existantes.

« Les zones de retour sont déjà pourvues de centres de santé, bien que ces installations ne soient pas suffisantes », a dit à IRIN/PlusNews Kabakumba Masiko, ministre de l’Information et de l’Orientation nationale. « Le gouvernement fera tout son possible pour favoriser la réhabilitation et le développement de la région. »

« Pour le moment, les services ne sont disponibles que dans les centres de santé des préfectures de comtés », a indiqué Stephen Oloya, président du comité de fermeture progressive des camps dans le district de Gulu. « En ce qui concerne les VCT [services de conseil et de dépistage volontaires], nous les étendons actuellement au niveau des sous-comtés, en essayant de rendre opérationnels tous les centres de santé des sous-comtés », a-t-il ajouté. « Nous prévoyons également d’ouvrir des centres de santé au niveau communal. »

Distributions communautaires

Cependant, une ONG (organisation non gouvernementale) locale a déjà mis en place des mesures permettant à ses bénéficiaires de continuer leur traitement sans interruption ; cette ONG, AIDS Support Organization (TASO), a ouvert, dans différents villages, des centres communautaires de distribution de médicaments, où les patients peuvent se procurer leur traitement et bénéficier d’un soutien psycho-social et d’une prise en charge médicale.

« Nous sommes en mesure de localiser et de suivre les patients dans les endroits où ils s’installeront ; afin de faciliter cette tâche, nous les encourageons à nous expliquer, sur une carte, où se situent leurs villages », a dit Sam Emukok, chargé des relations publiques chez TASO. « TASO continuera à fournir des services aux patients enregistrés, quel que soit l’endroit où ils se rendront après l’évacuation des camps. »

D’après M. Emukok, la plupart des personnes déplacées séropositives seraient heureuses de rentrer chez elles, car cela leur permettrait de cultiver elles-mêmes leur nourriture et d’avoir un régime alimentaire plus équilibré et plus varié que dans les camps.

« Les personnes qui vivent avec le VIH   et que nous prenons en charge sont conscientes de l’importance de la fermeture des camps, étant donné les difficultés auxquelles elles ont été confrontées dans les camps ; à présent, elles vont pouvoir se consacrer à leurs cultures et compléter ainsi leur régime alimentaire », a-t-il ajouté. « Nous transmettons cette information via les formations de santé dans les cliniques, les campagnes d’éducation et les émissions de radio. »

Plus des deux tiers des déplacés de la région ont déjà quitté les camps - certains sont retournés dans leurs villages et d’autres se sont installés dans des camps « satellites », situés entre les camps de déplacés officiels et leurs villages d’origine.

* noms d’emprunt

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