Sida : des défunts toujours privés de soins de conservation

Publié le 18 avril 2009 sur OSIBouaké.org

Libération, Eric Favereau le 14/04/2009

La revue Transversal - qu’édite le Sidaction - revient sur un sujet tabou : la discrimination post mortem à l’égard des personnes décédées du sida  . Pour des raisons obscures, les personnes séropositives sont interdites de soins de conservation. Et cela, en vertu d’une réglementation inchangée depuis 1986.

Ainsi, ce témoignage : « Le 5 avril 2007, mon frère Stéphane, qui vivait avec le VIH   est décédé », raconte sa sœur Sophie. « Je voulais lui offrir une dernière tenue pour les obsèques, je suis donc partie l’acheter en ville. Alors que je me trouvais dans le magasin de vêtements, le chef du service de réanimation m’a appelée, m’informant qu’au nom de la loi, Stéphane n’aurait pas droit à des soins de conservation, au motif que le sida   est contagieux. Le corps ne pourrait donc pas nous être présenté. » Et elle ajoute : « J’étais folle de rage et désespérée, je ne voulais pas que ce médecin contrôle la mort de mon frère. »

Que dit la loi ? Selon un arrêté du 17 novembre 1986, classant le sida   comme maladie contagieuse, « les soins de conservation, qui permettent la présentation du corps aux proches, sont interdits aux porteurs du VIH  . Ces pratiques consistent essentiellement en l’injection de produits antiseptiques dans l’organisme. » Résultat, « les simples manipulations, communément appelées soins de préparation comme le maquillage ou l’habillage, sont bannies ». De plus, la réglementation précise « que les personnes décédées porteuses du VIH   ne peuvent pas être exposées hors de l’établissement hospitalier ».

Cet arrêté avait été pris à une époque où l’on redoutait des risques de contamination en tout genre. Que les professionnels des soins post mortem ne se piquent ou ne s’infectent. Mais depuis, ce règlement n’a jamais été abrogé. Il y a bien eu un arrêté en juillet 1998, comme le rappelle Transversal, qui était censé abroger celui de 1986, mais bizarrement il n’est jamais entré en vigueur. Du coup, les professionnels sont tenus à celui de 1986, en dépit de son absurdité.

Et aujourd’hui, rien ne bouge. Des demandes ont été faites auprès du ministère de la Santé et du Conseil national du sida  . « Elles n’ont eu aucune réponse », lâche, désemparé, Jean-Luc Roméro, président des Elus contre le sida  .

Transversal, mars/avril 2009, n° 47 : 5 euros.

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