STIGMATE – Des séropositifs condamnés pour avoir caché leur maladie à leur partenaire

Publié le 3 décembre 2013 sur OSIBouaké.org

Big Bowser - 2 décembre 2013 - "L’une des choses qui rend cette affaire difficile, c’est que vous ne ressemblez pas à nos criminels habituels. D’habitude, il est facile pour un tribunal de dire si quelqu’un est dangereux. Il braque avec une arme. Il a commis un vol armé. Mais vous aussi vous avez créé une situation dangereuse." La phrase, prononcée par le juge Bradley Harris, s’adresse à Nick Rhoades, 39 ans et domicilié en Iowa, dans le centre des Etats-Unis. La phrase suivante tombe comme un couperet, et condamne ce dernier à vingt-cinq ans de prison : la peine de prison maximale que prévoit l’Iowa.

La cause : Nick Rhoades, séropositif, a eu une relation sexuelle sans avoir mentionné sa maladie à son partenaire. Ce dernier n’a pas été contaminé. Nick Rhoades portait un préservatif, et prenait des médicaments qui limitent la transmission du virus, rapportent Buzzfeed et Pro Publica, qui copublient cet article de Sergio Hernandez.

Mais dans l’Iowa, on ne plaisante pas avec ce que la section 709 du code de l’Etat nomme "transmission criminelle du HIV", même si la contamination n’a pas eu lieu.

Nick Rhoades n’est pas le seul dans ce cas. Selon ProPublica, au moins 541 condamnations similaires ont eu lieu ces dix dernières années dans 19 Etats. Ces affaires sont probablement plus nombreuses : aux Etats-Unis, 35 Etats sur 50 condamnent le fait d’exposer quelqu’un au sida  .

Selon Buzzfeed, certains séropositifs ont été condamnés pour des crachats ou des morsures. Et ce, même si le sida   ne se transmet pas par la salive. Ainsi, en 2011, l’Etat du Nebraska a adopté une loi qui punit de 1 000 dollars d’amende quiconque crache ou mord un responsable de la sécurité publique. Si l’auteur des faits est séropositif, le même acte est passible de 10 000 dollars d’amende, et de cinq ans de prison.

"Délinquant sexuel"

Aux Etats-Unis, plus d’un million de personnes vivraient avec le sida  , et un cinquième d’entre elles n’en sauraient rien. La moitié des nouveaux infectés ont contracté le virus en ayant eu des relations avec des personnes qui ignoraient tout de leur maladie.

Des chiffres qui font dire à Buzzfeed et ProPublica, témoignages d’experts à l’appui, que ces lois ne feraient qu’empirer la situation. "Si des personnes peuvent être emprisonnées pour avoir sciemment exposé d’autres personnes au HIV, leur meilleure défense pourrait être l’ignorance. De telles lois, donc, fournissent un puissant effet dissuasif pour que les citoyens soient testés", suggère Buzzfeed.

Le cas de Nick Rhoades a poussé certains législateurs à reconsidérer l’arsenal juridique. "Mettre quelqu’un en prison pour vingt-cinq ans alors qu’il n’a même pas transmis le HIV est la chose la plus absurde qu’un Etat puisse faire", a déclaré Matt McCoy, sénateur de l’Iowa, qui a introduit des amendements pour réduire les sanctions. "C’est moyenâgeux", a-t-il ajouté.

Après plusieurs demandes de ses avocats et de nombreuses pressions, la peine de Nick Rhoades a été allégée à cinq ans prison. Mais ce dernier restera inscrit jusqu’à la fin de ses jours sur la liste des délinquants sexuels, qui l’empêche d’être seul avec toute personne de moins de 14 ans, y compris des membres de sa famille.

Un extrait de l’interrogatoire de Nick Rhoades (en anglais), publié par ProPublica :

Photo du logo : La maison blanche, le 1er décembre 2013. AP

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