La claque, ça fait vraiment mal

Publié le 20 juin 2013 sur OSIBouaké.org

Le parisien - Florence Deguen - 18.06.2013 -

Le spot qui sera diffusé à la télévision à partir de samedi montre la violence physique d’une gifle infligée à un enfant. (Fondation pour l’enfance.)

C’est un petit film qui frappe… Pour vous faire réfléchir à deux fois le jour où vous serez tenté de frapper. Le nouveau clip de la Fondation pour l’enfance contre les violences éducatives ordinaires mettra en scène, sur quinze chaînes télévisées à partir de samedi, les effets d’une claque au ralenti… Un visage d’enfant surpris et impuissant filmé au rythme de 1000 images par seconde, qui dévisse littéralement sous la main de sa mère, excédée par quelques vroum vroum alors qu’elle est au téléphone… Les lèvres du garçonnet, la mâchoire, la chair, tout est violemment impacté et le spectateur reçoit, lui, un choc au moins aussi fort : vu sous cet angle, c’est de la violence, pas de l’éducation.

« C’est le message qu’on veut faire passer », explique Gilles Lazimi, médecin du centre de santé de Romainville (Seine-Saint-Denis) et coordinateur de cette campagne, la deuxième que lance la Fondation pour l’enfance sur ce thème après un premier clip en 2011. « Il n’y a pas de petite claque. C’est une violence, et il n’y a pas de violence sans conséquences ni sans risques. Un cerveau d’enfant est fragile… Et quand on sait que 50% des parents français donnent la première claque avant l’âge de 2 ans, il serait temps d’en prendre conscience. »

C’est un fait, alors que 33 pays dans le monde interdisent aux parents d’infliger le moindre châtiment corporel — pas même une tape sur la main —, l’Hexagone reste drapé dans sa certitude qu’une « bonne fessée n’a jamais fait de mal à personne ». Il n’existe pas de statistiques, mais, en gros, 85% des parents français avouent avoir la main plus ou moins leste. Beaucoup n’en sont pas vraiment fiers et regrettent ces gestes qui leur échappent.

Tous les médecins qui se sont penchés au long court sur le supposé effet positif d’une claque sont formels. « Une gifle interrompt l’activité cérébrale, tente de résumer le docteur Lazimi. Elle empêche l’enfant de penser, elle l’inonde d’hormones de stress, le dépossède de son corps, ce qui, à terme, peut l’inciter à mettre son corps en danger (vitesse, alcool…). Mais surtout, il finit par penser que frapper est un mode de communication, qu’aimer, c’est frapper. Et le jour où il sera parent à son tour, il lèvera la main sur ses enfants… »

Un cercle vicieux. Avec un risque d’escalade réel, puisque les adultes qui pensent que les violences leur ont été profitables ont tendance à taper plus tôt, plus souvent et plus fort. Et si une petite minorité glisse vraiment vers la maltraitance pénale, aucun ne bascule dans l’enfer sans être d’abord passé par la case « claque ». Alors, certes, il est difficile de culpabiliser tous ceux qui cèdent, parfois, à ce mauvais réflexe, surtout quand ils agissent sous le coup de la peur parce que l’enfant s’est mis en danger.

« Mais une loi interdisant les claques permettrait aux parents de prendre conscience que ce n’est pas la solution », plaide Gilles Lazimi. Des politiques ont tenté de légiférer par le passé, comme la pédiatre et député UMP Edwige Antier. Un combat vain à ce jour, mais qui a le mérite de transcender les étiquettes politiques. La socialiste Edith Gueugneau, députée de Saône-et-Loire, ou Henriette Zoughebi, vice-présidente du conseil régional d’Ile-de-France (Front de gauche), sont ce matin aux côtés d’Edwige Antier pour soutenir le lancement de ce petit film. Et le Conseil de l’Europe pousse avec insistance à la roue pour que la France bannisse la fessée… Comme l’Espagne, le Portugal ou la toujours très exemplaire Allemagne…

VIDEO. Campagnes violences éducatives 2013 : « Il n’y a pas de petite claque ! »

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