Cameroun : l’accès des personnes séropositives aux examens biologiques est menacé

Le point sur la mobilisation des malades pour défendre leur accès aux soins

Publié le 23 février 2008 sur OSIBouaké.org

Ci-dessous quelques articles pour un récapitulatif du dossier de la semaine : l’accès aux examens biologiques est menacé au Cameroun...


Sida   au Cameroun : combien coûtent nos vies ?

Multiplier par 7 le prix des bilans sanguins, c’est tuer les malades du sida  

Communiqué de presse - Act Up-Paris & MoCPAT - 20 février 2008

http://www.actupparis.org/article3298.html

Aujourd’hui 20 février 2008, des militantEs d’Act Up-Paris ont manifesté devant l’ambassade du Cameroun à Paris (1), en solidarité avec les malades du sida   camerounaiSEs qui manifestent pacifiquement à Yaoundé. Nous protestons contre la décision des autorités camerounaises de priver d’examens biologiques les malades du sida   dans ce pays. Sans examens biologiques, il est impossible d’assurer l’efficacité du traitement anti-sida  . Act Up-Paris rejoint le Mouvement Camerounais Pour l’Accès au Traitement (MoCPAT) et appelle publiquement le ministre de la Santé camerounais, M. Mamafouda, à annuler d’urgence cette décision meurtrière et irresponsable.

La décision de stopper l’accès aux examens biologiques au Cameroun a été diffusée le 8 janvier 2008 par le Conseil National de Lutte contre le Sida   (CNLS) à travers une circulaire ordonnant le dé- subventionnement des bilans VIH   (2).

Les malades vont ainsi devoir débourser pour un bilan sanguin 21 000 CFA (l’équivalent de 32 euros), au lieu de 3000 CFA auparavant. Or, 80% des malades Camerounais ont moins de 30 euros par mois pour vivre. Arrêter de subventionner, c’est donc arrêter l’accès aux examens biologiques.

Cette décision met les malades camerounaiSEs en danger de mort. En effet, les examens biologiques permettent aux professionnelLEs de santé de se rendre compte à l’avance lorsqu’unE patientE qui a l’air « normal » est en réalité sur le point de mourir, ou de tomber très gravement malade. En anticipant le problème grâce aux examens biologiques, les soignantEs peuvent alors intervenir avant la catastrophe, et sauver leur patientE. Sans examens biologiques, touTEs ces malades meurent alors que leur vie pourrait facilement être sauvée.

Nous rappelons que le Fonds mondial sida  -tuberculose-paludisme est prêt à financer les examens biologiques VIH   au Cameroun. Nous exigeons que le Ministre camerounais de la Santé confirme publiquement que les examens biologiques seront rapidement accessibles gratuitement.

(1) D’autres photos : http://www.actupparis.org/portfolio2.php? id_document=4845 (2) Voir la circulaire : http://www.actupparis.org/article3297.html


Cameroun : Act up proteste contre des examens à la charge des Séropositifs

AFP 20.02.08 | 13h13

Une dizaine de militants de l’association de lutte contre le sida   Act Up ont manifesté mercredi devant le consulat du Cameroun à Boulogne- Billancourt (Hauts-de-Seine) pour protester contre la fin de la prise en charge des examens biologiques des séropositifs et malades, a affirmé à l’AFP un des ses responsables.

Les manifestants ont brièvement déployé une banderole portant l’inscription "Sida   : combien coûtent nos vies ?". Cette action symbolique visait à soutenir une manifestation qui devait se tenir le même jour à Yaoundé, selon Khalil Elouardighi, porte parole de l’association.

Act Up dénonce la décision prise par le gouvernement camerounais le 8 janvier de faire "dorénavant payer aux malades du sida   32 euros (21.000 FCFA) pour avoir droit à une prise de sang et des examens biologiques" indispensables au suivi de leur état et jusque là pris en charge par des subventions publiques versées aux centres de santé. "80% des malades de ce pays ont moins de 30 euros pour vivre par mois, c’est donc les exclure de l’accès aux examens", dénonce l’association.

Dans ce pays de plus de 16 millions d’habitants, 5,5% des adultes de 15 à 49 ans seraient contaminés par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH  ), soit 510.000 personnes, selon l’Onusida  .


Des malades assiègent le Comité national de lutte contre le sida   Les manifestants exigent la gratuité des examens biologiques

Le secrétaire permanent a signé une note les faisant passer de 3000 Fcfa à 21 000 Fcfa.

http://www.lejourquotidien.info/index.php?option=com_content&task=view&id=18 37&Itemid=61

La mobilisation des personnes vivant avec le Vih   sida   se lisait dans les messages portés sur leurs cartons et banderoles affichés à l’entrée du siège du Comité national de lutte contre le sida   à Yaoundé."Non à 21.000Fcfa, oui à 0 Fcfa ", ou encore "Où sont passés nos 29 millions, nous ne voulons pas les quotas, la mort n’a pas de quotas ", pouvait-on lire à l’entrée du Cnls.

Selon Betrand Kampoer, responsable du Mouvement camerounais pour le plaidoyer et l’accès au traitement (Mocpat), il serait malhonnête de ne pas reconnaître les efforts jusqu’ici fournis par le gouvernement. Efforts ayant abouti à la gratuité du traitement, à la multiplication d’unités de prise en charge et des centres de traitement agréés. Ces efforts, confirme-t-il, ont donné lieu à la signature d’un arrêté le 30 juin 2006 du ministre de la Santé publique de l’époque, Urbain Olanguena Awono, fixant à 3.000Fcfa, le prix des bilans biologiques semestriels. "Grande a été notre surprise de voir qu’au moment où le prix devait passer à 1.000Fcfa, comme le prévoyait l’arrêté du ministre, le secrétaire permanent du Comité national de lutte contre la sida  , Dr Maurice Feuze par une circulaire interne, décide de fixer le prix à 21.000Fcfa ", indique Bertrand Kampoer.

Écrit par Adrienne Engono


Arbitrage : Mama Fouda temporise le jeu

Le ministre de la Santé publique a annulé la note du Comité national de lutte contre le sida   augmentant le prix des examens biologiques.

http://www.lejourquotidien.info/index.php?option=com_content&task=view&id=18 36&Itemid=61

André Mama Fouda a signé le 19 février dernier un communiqué de presse maintenant les quotas jusque-là appliqués sur les examens biologiques. Ces quotas sont définis dans la décision ministérielle du 30 juin 2006 comme suit :

3.000Fcfa à payer par le patient et 18.000Fcfa que supporte le Comité national de lutte contre le sida  , qui bénéficie d’un financement du Fonds mondial de lutte contre le Sida  , le paludisme et la tuberculose. Les pouvoirs publics, à travers le ministère de la Santé publique, envisageaient déjà, à la date de signature de cette décision, de trouver des financements pour pouvoir aboutir à la gratuité de ces examens.

Mais, le Comité national de lutte contre le sida  , à travers une circulaire, a décidé de faire payer tous les 21.000Fcfa aux patients. Pour les personnes vivant avec le Vih  , revenir à 3.000Fcfa ne change pas grand chose à la situation des nombreux malades démunis. Il faut plutôt envisager la gratuité pour toutes les personnes infectées. Car, les risques de réinfections sont énormes. " Sur 510.000 personnes infectées, moins de 10.000 sont concernées par la prise en charge des examens biologiques", explique Bertrand Kampoer. Il affirme que dans les centres de traitement agréés, tout est mis à contribution pour que le malade du sida   décède. "Il y a des barrières qui s’érigent partout. Lorsque vous devez par exemple passer du traitement de première ligne pour celui de deuxième ligne, on vous impose un examen de 150.000Fcfa, sans lequel votre traitement ne peut se poursuivre", souligne-t-il. En fait, le traitement de deuxième ligne est prescrit à un malade qui présente des résistances pour le traitement de première ligne.

Celui-ci estime que le ministre de la Santé publique, André Mama Fouda, devrait par exemple signer un arrêté. Il ne peut donc pas se contenter d’un communiqué rédigé à la suite d’une réunion avec quelques personnes, pour annuler une pratique qui prenait déjà corps dans certains hôpitaux. Les manifestants se plaignent de la stigmatisation dont ils sont l’objet dans les unités de prise en charge : " Si vous vous rendez par exemple à l’hôpital central, vous constaterez que le malade du sida   est représenté par une caricature semblable à celle d’un diable, or, chaque jour, ils prêchent régulièrement pour la non-marginalisation des malades", relève, pour le déplorer, Bertrand Kampoer. Les personnes vivant avec le Vih   sida   disent que dans certaines unités de prise en charge, on s’arrange à créer la pénurie des réactifs pour orienter les patients au Centre pasteur par exemple, où les examens coûtent 24.900Fcfa.

Au Comité national de lutte contre le sida  , le Dr Maurice Feuze, le secrétaire permanent, qui dit ne pas avoir de commentaire sur la question a rencontré les manifestants. Des échanges qu’il a eu avec eux, il est ressorti que, dorénavant, les personnes vivant avec le Vih   seront associées dans le processus de prise de décisions relatives à leur suivi médical. Il leur a aussitôt demandé de déléguer quatre personnes devant participer à la rencontre du groupe de travail qui se déroulera le 4 mars prochain. Réunion de réflexion qui aboutira à la proposition des solutions de financement en vue de couvrir les 110.000 bilans biologiques de suivi attendus en 2008.

Écrit par Adrienne Engono


Cameroun : Les activistes alarmés par la remise en cause de la baisse des prix

Yaoundé, 22 février 2008 (PLUSNEWS)

Les organisations camerounaises de lutte contre le VIH  /SIDA   se disent inquiètes de l’avenir de la prise en charge des personnes séropositives au Cameroun, suite à une tentative récente de l’Etat camerounais de réduire sa subvention aux examens de suivi biologique du VIH  .

Même si dans un communiqué publié cette semaine, le ministère de la Santé a indiqué que « le ministre de la Santé publique [André Mama Fouda avait] annulé la note » du 8 janvier prévoyant « la fixation des quotas semestriels des bilans de suivi biologiques subventionnés » pour les personnes vivant avec le VIH  , les associations de lutte contre le sida   ne se sentent pas rassurées pour autant.

« Ce qui vient de se passer n’est que le prémisse de ce qui nous attend dans un avenir proche », s’est alarmé Alain Fogué, président du Mouvement camerounais pour le plaidoyer et l’accès aux traitements (MOCPAT).

Le gouvernement avait décidé, le 30 juin 2006, de subventionner les examens de suivi biologique du VIH  , permettant ainsi aux patients séropositifs d’effectuer ces examens pour 3 000 francs CFA (environ sept dollars) contre 21 000 francs CFA (48 dollars) auparavant.

Mais fin janvier 2008, le MOCPAT a appris « de manière officieuse... qu’une note datée du 8 janvier du Comité national de lutte contre le VIH  /SIDA   [CNLS] indiquait qu’allait être instauré pour chaque centre de prise en charge un quota de patients bénéficiaires des examens biologiques subventionnés », a expliqué à IRIN/PlusNews M. Fogué.

« La note prévoyait que ces derniers, choisis on ne sait comment, continueraient de payer 3.000 francs CFA leur examen tandis que les autres auraient à débourser comme autrefois 21.000 francs CFA », a-t-il poursuivi.

Après avoir tenté d’établir un dialogue avec les autorités camerounaises, le MOCPAT a finalement organisé une manifestation à Yaoundé devant le siège du CNLS. En soutien, l’association française de lutte contre le sida   Act Up a fait de même devant l’ambassade du Cameroun à Paris, en France.

Face à la mobilisation des activistes et au tollé suscité par la tentative du gouvernement -inédite à l’heure où la tendance est plutôt vers la baisse du coût de la prise en charge pour le patient-, le ministre de la Santé publique a donc fait machine arrière cette semaine.

L’Etat continuera de prendre en charge la majeure partie du coût du bilan pré-thérapeutique et du bilan semestriel de suivi des personnes sous antirétroviraux, qui continueront à payer 3 000 francs CFA, a dit M. Mama Fouda.

Des financements trop rares

Le ministre de la Santé a également annoncé la constitution d’un groupe de travail « pour réfléchir sur des solutions de financement en vue de couvrir les 110.000 bilans de suivi attendus pour 2008 ».

Car selon le docteur Maurice Fezeu, secrétaire permanent du CNLS, la décision gouvernementale a été motivée par le fait qu’il y avait eu « plus de bilans à faire que de ressources disponibles » en 2007.

Le retour à des examens biologiques subventionnés ne résout pas le problème du manque de financements permettant la prise en charge à moindre coût du VIH  , entre autres du suivi biologique, selon M. Fogué, pour qui la situation reste extrêmement préoccupante.

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alain fogué président du MOCPAT
(c)photo osi.bouake

« Le Cameroun vit toujours sur les fonds attribués lors du 5ème [appel à proposition] du Fonds mondial [de lutte contre le sida  , la tuberculose et le paludisme], puisqu’il a été recalé pour les 6ème et 7ème [appels]. S’il n’est pas éligible pour le 8ème, ce sera la catastrophe », s’est-il alarmé.

« Si rien n’est fait rapidement pour aboutir à un changement, nous serons face dans six ou 12 mois à une situation bien pire que celle à laquelle nous venons d’être confrontés », a-t-il estimé.

De nombreux activistes craignent que cette tentative de revenir sur la baisse des coûts, obtenue de haute lutte, puisse ouvrir la voie à d’autres « reculades », dans un pays où 5,5 pour cent des quelque 16 millions d’habitants vivent avec le VIH  , selon les Nations Unies.

« Si les autorités sont capables de nous demander aujourd’hui de payer 21 000 francs CFA l’examen biologique, nous avons peur que demain ou le jour suivant, le traitement contre le VIH  /SIDA   ne soit plus gratuit non plus », a expliqué un activiste le 21 février sur les ondes de la radio nationale camerounaise.

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