N’Zrama : un engagement communautaire de jeunes affectés/infectés par le VIH aux côtés de leurs semblables

Témoignage passionnant d’un jeune membre de 23 ans

Publié le 3 février 2007 sur OSIBouaké.org

Nous vous avons déjà parlé de N’ZRAMA sur ce blog, il s’agit d’une association ivoirienne communautaire de jeunes affectés/infectés par le VIH  /SIDA  . Vous connaissez déjà son Président, Rodrigue Koffi, dont vous avez pu lire les discours et témoignages dans nos pages.

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Urbain Coulibaly
lors de l’assemblée générale de N’Zrama, le 28 octobre 2006

Aujourd’hui, en exclusivité pour le blog OSI Bouaké, la parole est à Urbain Coulibaly, qui est le superviseur des visites à domicile de l’association. Né le 1er janvier 1983, Urbain est l’aîné d’une famille de 5 enfants (4 garçons et 1 fille) dont l’un est séropositif et sous ARV  , tout comme leurs deux parents. Il fait partie des membres fondateurs de N’ZRAMA, en mars 2000 et est détenteur d’un Brevet de technicien en maintenance industrielle depuis mai 2005. Son implication dans la lutte contre le Sida   a été propulsée par sa mère qui, le soupçonnant de connaître leur statut sérologique, a demandé à l’assistante sociale et au psychologue du Centre SAS de lui annoncer son statut sérologique en 1999.

Urbain nous présente dans l’article qui suit, la réalité du travail de N’ZRAMA sur le terrain et nous le remercions, ainsi que toute l’équipe - pourtant si jeune - pour ce dynamique témoignage.

Sandrine


Les activités de visite à domicile (VAD) sont menées en allant sur la base de l’un des objectifs de l’association qui est le renforcement des liens de fraternités, d’entraide, et de solidarité. Pour atteindre ces objectifs, l’Association se propose d’organiser des rencontres amicales dans les familles au près des enfants et jeunes pour mieux se connaître ce depuis sa création. Plus tard avec le nombre d’enfants et jeunes qui s’augmentait, ces simples visites de courtoisies ont laissé la place à de véritables visites à domicile qui se font de la manière suivante : Le Président a procédé à la mise en place du comité des délégués, à sa tête un président qui est également le superviseur. Ce comité est l’émanation des délégués, au nombre de 9, qui sont les représentants de l’association dans les différents quartiers. Ils sont chargés d’organiser des séances de visites à domicile chez les enfants et jeunes suivis. Ils aident le secrétaire à l’information et à la mobilisation dans sa tâche.

Comment avons-nous connaissance des familles ?

Pour rappel, il faut dire que la quasi-totalité des familles que nous suivons sont enregistrées et suivies par le Centre S.A.S Bouaké.

Lorsqu’un nouvel usager (un cas suspect de contamination au VIH  ) arrive au Centre S.A.S, et qu’il est déclaré séropositif, il rencontre un assistant social. Ce dernier, après le point des possibilités de prise en charge proposées par le centre S.A.S, les conseils, l’enregistrement de la famille, etc. lui présente l’association N’ZRAMA. Si cet usager est intéressé par l’action de N’ZRAMA, l’Assistant l’oriente vers l’association pour entretien. C’est donc au cours de cet entretien avec l’usager et un autre avec l’assistant social qui a fait l’orientation que nous faisons la connaissance des familles.

Il arrive des fois où les usagers sont orientés par les conseillers de Bouaké Eveil (Association des personnes vivant avec le VIH   de Bouaké). Dans ce cas, nous rencontrons le conseiller donné pour mieux cerner la situation et prenons attache avec l’assistant social qui suit cet usager au niveau du Centre S.A.S avant de rencontrer l’usager.

Comment se décide une Visite à Domicile ?

Lors de l’entretien que nous avons avec le nouvel usager, nous lui présentons, en plus détaillé, l’association N’ZRAMA et faisons connaissance de la famille (nombre d’enfants, nombre d’enfants à charge, tranche d’âge, occupation, quartier de résidence, situation matrimoniale, etc.). Dans la présentation détaillée, nous présentons les différentes activités de l’association, surtout les VAD. Après, s’en suit généralement des échanges avec l’usager qui aimerait, à travers des questions, mieux comprendre les tenants et aboutissants de ces visites. Le principe de confidentialité est la base de cet entretien. Cela pour mettre l’usager en confiance.

Au sortir de cet entretien, la décision de faire ou pas une VAD chez ce usager est prise avec l’accord de ce dernier. Lorsqu’il accepte les VAD, nous décidons d’un jour de rendez-vous pour réaliser la première visite. Cette visite permet de mieux connaître toute la famille, le lieu d’habitation, etc. Pour un problème de confiance, cette première visite est réalisée par le Président du comité des délégués (superviseur terrain des VAD) ou par le Président de l’Association. C’est après cela que le délégué, avec l’aide du superviseur terrain, fait connaissance de la famille.

Dans le cas où l’usager ne veut pas q’on lui rende visite chez lui à la maison, en tout cas pas dans l’immédiat, nous commençons un processus de renforcement de confiance avec ce dernier ; processus qui consiste à donner un autre Rendez-vous pour mieux discuter des blocages ce cette VAD et des conditions dans lesquelles elle pourrait se dérouler.

C’est après l’accord de l’usager de faire une VAD chez lui. Le délégué est chargé de faire les VAD au moins une fois par semaine dans les familles qu’il suit.

Quel est le contenu de cette Visite à Domicile ?

Pendant ces visites, les délégués échangent avec les enfants et jeunes ainsi que leurs parents de la situation à la maison afin de recenser les différents problèmes Les problèmes sont ensuite remontés à l’association lors des réunions hebdomadaires ou avant (surtout pour les problèmes de santé) pour trouver des solutions.

Ces visites permettent aussi de discuter de l’association N’ZRAMA et d’encourager les enfants et jeunes à s’y intéresser en les invitant à participer aux différents activités, surtout aux séances éducatives du mercredi après-midi.

Enfin, ces visites permettent de créer et de renforcer des liens de fraternité et d’entraide entre les membres des différentes familles et les délégués et au-delà, entre les familles et N’ZRAMA. Tout cela pour mette les parents en confiance afin qu’ils nous aident dans notre mission

Quelles sont les difficultés lors des Visites à domicile ?

Les difficultés sont d’ordre scolaire, alimentaire, sanitaire, familial etc. .....Les enfants manque souvent de fourniture et même d’argent pour payer les frais de scolarité et es tenus scolaire. Souvent la famille manque de nourriture soit l’un des l’enfants suivi tombe malade et il n’y a pas d’argent pour payer les médicaments. Souvent les enfants sont confrontés à des problèmes de familles avec les parents de leur père ou de leur mère sur des histoires d’héritage par ce que après le décès de l’un de ces deux ou des deux, leurs parents veulent tout emportés.

En quoi consiste mes supervisions ?

Ces supervisions consistent, dans un premier temps, à suivre les délégués dans l’exécution de leur tâche et avec l’aide du président ou du chargé de finance à essayer de résoudre les différentes difficultés que ceux-ci rencontrent sur le terrain dans les différentes familles. Dans un deuxième temps ces supervisions permettent d’entretenir et de renforcer la confiance entre les familles et l’Association. Je suis donc appelé à être constamment sur le terrain.

Nombre de bénéficiaire des Visites à Domicile

Au 31 décembre 2007, Le nombre de bénéficiaires (enfants et jeunes) est de 487 (258 filles et 229 garçons), regroupés dans 110 familles.

Exemple d’une intervention de terrain

Lors de mes supervisions dans l’une des familles, nous avons constaté qu’un enfant ne partait pas à l’école pour faute de moyens. Situation accentuée par le fait que le père est parti sans laisser de trace, et ce depuis plus de 3 ans, laissant la mère malade toute seule avec les enfants. J’ai remonté le problème au président et ensemble nous avons trouvé des solutions : Nous avons d’abord acheté les médicaments qui avaient été prescrit à la mère et qu’elle ne pouvait acheter. Nous avons ensuite donné un peu d’argent pour assurer la sauce (car ils bénéficient d’un appui en denrées alimentaires). Enfin, nous avons entrepris des démarches qui ont aboutit à la scolarisation de l’enfant qui devait s’inscrire en classe de 5ème.

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Photo de famille des jeunes de Nzrama
Le jour de l’assemblée générale 2006, devant les (anciens) locaux du CSAS de Bouaké

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