Les lois répressives et les violations des droits de l’homme entravent la réponse mondiale au VIH

Publié le 11 juillet 2012 sur OSIBouaké.org

ONU   - New York - 09 juillet 2012 - Un important rapport démontre que des lois répressives entravent les réponses au VIH   et constituent un gaspillage de ressources. La Commission appelle avec insistance à l’adoption de lois qui protègent les droits de l’homme et qui sauvent des vies, économisent de l’argent et mettent fin à l’épidémie.

Selon un rapport de la Commission mondiale sur le VIH   et le droit, un organisme indépendant composé de leaders mondiaux et d’experts, des lois répressives et des violations des droits de l’homme coûtent des vies humaines, gaspillent de l’argent et entravent la réponse mondiale au SIDA  . Le rapport de la Commission, intitulé « Le VIH   et le Droit : Risques, Droits et Santé », s’appuie sur des preuves de la mauvaise utilisation par des gouvernements appartenant à toutes les régions du monde du potentiel que présentent les systèmes juridiques pour lutter contre le VIH  . Il conclut également que des lois fondées sur des constats et sur les droits de l’homme renforceront la réponse mondiale au SIDA  . De telles lois existent et doivent être mises en application à grande échelle et de manière urgente.

« Des mauvaises lois ne devraient pas permettre d’empêcher des réponses efficaces au VIH   », a déclaré Helen Clark, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement. « Dans leur déclaration politique sur le VIH  /SIDA   de 2011, les États membres se sont engagés à réviser les lois et les politiques qui entravent l’efficacité des réponses au VIH  . L’une des principales contributions des travaux de cette Commission a été d’améliorer ce processus dans certains pays et de le catalyser dans d’autres. »

La Commission mondiale sur le VIH   et le droit, qui compte parmi ses membres d’anciens chefs d’État et d’éminents experts en matière de droit, de droits de l’homme et de VIH  , a ancré son rapport dans des travaux de recherche de grande envergure et des témoignages de première main apportés par plus de 1 000 personnes appartenant à 140 pays. La Commission, qui a reçu l’appui du Programme des Nations Unies pour le développement au nom du Programme commun des Nations Unies sur le VIH  /SIDA  , démontre que dans de nombreux pays, les lois répressives et les pratiques discriminatoires compromettent les progrès dans la lutte contre le VIH  .

Par exemple, des lois et des coutumes légalement admises qui n’offrent pas aux femmes et aux filles une protection contre la violence, renforcent les inégalités entre hommes et femmes et accroissent la vulnérabilité de ces dernières au VIH  . Certaines lois et politiques en matière de propriété intellectuelle ne sont pas en conformité avec la législation internationale en matière de droits de l’homme et entravent l’accès à des traitements susceptibles de sauver des vies et à la prévention.

Les lois qui pénalisent et déshumanisent les populations les plus exposées au risque du VIH  , dont notamment les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, les travailleurs du sexe, les personnes transgenres et les consommateurs de drogues injectables, poussent ces populations à la clandestinité, les éloigne des services essentiels de santé, et leur font courir un risque accru d’infection au VIH  . Les lois qui criminalisent la transmission du VIH  , l’exposition au virus ou la non-divulgation de la séropositivité au VIH   découragent le dépistage et le traitement.

En particulier :

  • Dans plus de 60 pays, exposer une autre personne au VIH   ou lui transmettre le virus constitue un crime. Plus de 600 personnes séropositives dans 24 pays, y compris aux États-Unis, ont été reconnues coupables de tels crimes. Ces lois et pratiques découragent les populations de se faire tester au VIH   et de déclarer leur statut sérologique.
  • 78 pays criminalisent les relations sexuelles entre personnes de même sexe. L’Iran et le Yémen appliquent la peine de mort pour les relations sexuelles entre hommes ; la Jamaïque et la Malaisie punissent les relations homosexuelles d’une longue peine d’emprisonnement. Ces lois rendent difficile la prévention de la transmission du VIH   parmi les personnes les plus vulnérables à l’infection.
  • Dans certains pays, comme le Cambodge, la Chine, Myanmar, la Malaisie et les Philippines, des lois criminalisent des interventions qui ont fait leurs preuves auprès de consommateurs de drogues injectables. Par contre, les pays qui ont légalisé des services de réduction des risques, à l’instar de la Suisse et de l’Australie, ont pratiquement arrêté les nouvelles infections au VIH   parmi les consommateurs de drogues injectables.
  • Plus de 100 pays pénalisent certains aspects du travail du sexe. Dans de nombreux pays, l’environnement juridique contribue à exposer les travailleurs du sexe à la violence et à entraîner leur exclusion sur le plan économique et social. Il les empêche également d’avoir accès aux services essentiels de prévention et de soins contre le VIH  .
  • Des lois et coutumes qui enlèvent toute autonomie aux femmes et aux filles, et qui vont des mutilations génitales au déni de droits de propriété, réduisent leur capacité à négocier les relations sexuelles sans risques et à se protéger de l’infection au VIH  . Dans 127 pays, il n’existe aucune législation qui empêche le viol conjugal.
  • Des lois et politiques qui refusent aux jeunes gens l’accès à l’éducation sexuelle, à la réduction des risques et aux services de santé de la reproduction et de lutte contre le VIH   facilitent la propagation du virus.
  • Des protections excessives de la propriété intellectuelle qui entravent la production de médicaments à faible coût, notamment les traitements de deuxième génération, entravent l’accès au traitement et à la prévention.

L’application de mauvaises lois constitue un gaspillage de ressources et sape l’efficacité des réponses au VIH  .

Au cours des trois dernières décennies, des avancées scientifiques accompagnées d’investissement se chiffrant en milliards de dollars ont donné lieu à un développement remarquable des méthodes de prévention et de traitement du VIH   qui a sauvé des vies, et aidé de nombreuses personnes, familles et communautés. Pourtant, selon le rapport de la Commission, de nombreux pays gaspillent les ressources dont ils disposent en promulguant et en appliquant des lois qui peuvent détruire l’effet de ces investissements essentiels.

« Trop de pays gaspillent des ressources essentielles en appliquant des lois archaïques qui ignorent la science et qui perpétuent la stigmatisation », a déclaré l’ex-président du Brésil, Fernando Henrique Cardoso, qui préside la Commission. « Maintenant plus que jamais, nous avons une occasion d’épargner aux générations futures la menace du VIH  . Nous ne pouvons pas permettre à l’injustice et à l’intolérance d’entraver ces progrès, surtout pas par ces temps économiquement difficiles. »

Les gouvernements doivent voter des lois fondées sur des constats et sur les droits de l’homme et établies dans l’intérêt de la santé publique.

Selon le rapport, des lois fondées sur des évidences solides en matière de santé publique et sur les droits de l’homme peuvent transformer la réponse mondiale au VIH  . Le rapport de la Commission démontre que de telles lois et pratiques existent et qu’il faut les reproduire. Pour mette fin à l’épidémie de lois nuisibles et promouvoir des lois qui renforcent l’efficacité des réponses au VIH  , la Commission appelle de manière urgente les gouvernements à mettre fin à la discrimination basée sur le statut positif au VIH  , et à abroger les lois qui criminalisent la transmission du VIH   ou la non-divulgation du statut sérologique. La Commission appelle également les gouvernements à faire usage de la loi pour mettre fin au fléau de la violence contre les femmes et les filles, et à résister aux pressions internationales visant à privilégier le commerce par rapport à la santé de leurs citoyens. Elle recommande aussi la décriminalisation des relations sexuelles entre personnes de même sexe, du travail du sexe volontaire et de la consommation de drogues, ce qui permettra aux populations vulnérables d’avoir accès aux services de lutte contre le VIH  .

« Les femmes constituent la moitié de la population mondiale et les jeunes sont notre avenir », a déclaré Nevena Ciric, une femme séropositive d’origine serbe. « Les pays doivent voter des lois qui interdisent la violence contre les femmes et les filles, et qui encouragent une éducation en matière de santé sexuelle complète et la prestation de services de santé sexuelle aux jeunes. »

La communauté mondiale a un rôle déterminant à jouer. Les leaders mondiaux, les groupes de la société civile et les Nations Unies doivent tenir les gouvernements responsables des normes les plus élevées en matière de droit international, de santé publique et de droits de l’homme, et se faire les défenseurs de politiques et pratiques fondées sur des évidences en matière de droits de l’homme et de santé publique.

« Dans le monde entier, les gouvernements ont la responsabilité de mener des actions courageuses et d’abroger des lois qui reflètent l’ignorance et l’intolérance », a déclaré Maurice Tomlinson, un avocat jamaïcain et conseiller juridique de l’organisme international AIDS-Free World. « En Jamaïque où le taux de prévalence parmi les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes est parmi les plus élevés au monde, les lois anti-sodomie sèment la peur et la violence et éloignent ces hommes des soins et des traitements dont ils ont besoin ».

Les gouvernements doivent suivre la voie des pays qui ont voté des lois qui favorisent une réponse efficace au VIH  . Par exemple, les pays africains et des caraïbes qui ne criminalisent pas les relations sexuelles entre personnes de même sexe ont des taux de prévalence VIH   plus faibles chez les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes. Les pays qui considèrent les consommateurs de drogues injectables comme des patients et non comme des criminels – notamment la Nouvelle-Zélande, l’Allemagne, l’Australie, la Suisse et le Portugal – ont des taux d’accès aux services de lutte contre le VIH   plus élevés et des taux de transmission du VIH   plus faibles chez les personnes qui consomment des drogues.

« Nous devons nous assurer que des nouvelles interventions pour prévenir et traiter le VIH   atteignent les personnes qui en ont le plus besoin », a déclaré l’ex-président du Botswana, Festus Mogae, membre de la Commission. « Les lois qui interdisent la discrimination et la violence et protègent les populations à risque sont un outil puissant et peu coûteux pour s’assurer que les investissements en matière de VIH   ne sont pas perdus. Sans aucun doute, appliquer ces lois est sans doute complexe et politiquement difficile, mais notre rapport montre que cela est possible et doit être fait. »

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