Vols de bébés : la justice argentine inflige 50 ans de prison à Jorge Videla

Publié le 7 juillet 2012 sur OSIBouaké.org

Le Monde.fr - 06.07.2012 - La justice argentine a condamné jeudi à de lourdes peines de prison d’anciens responsables de la dictature (1976-1983), dont les deux anciens dictateurs Jorge Videla et Reynaldo Bignone, coupables d’avoir mis en place "un plan systématique" de vols de bébés d’opposants.

Le tribunal a décidé de "condamner l’ex-général Jorge Videla (86 ans) à cinquante ans de réclusion (...) et l’ex-général Reynaldo Bignone (84 ans) à quinze ans", a lu la présidente du tribunal, Maria Roqueta, devant une salle comble. Au total, huit anciens responsables militaires étaient jugés depuis février 2011 pour leur participation à ce que la justice a qualifié de "plan systématique" de vols et d’appropriation par des proches du régime de 35 enfants d’opposants nés en détention.

Ont également été condamnés Jorge "Tigre" Acosta (trente ans de prison), Antonio Vañek (quarante ans), Juan Azic (quatorze ans), Jorge Magnacco, un ancien médecin militaire (dix ans), et Santiago Riveros (vingt ans). En revanche, l’ancien responsable de la marine Rubén Franco a été acquitté. Jorge "Tigre" Acosta était un responsable de l’ESMA (Ecole de mécanique de la marine), centre de torture emblématique situé en plein Buenos Aires, où sont nés et ont été pris à leur mère la plupart des bébés.

Egalement poursuivis, mais pour appropriation d’enfants, Victor Gallo, ex-militaire, et son épouse, professeur, Susana Colombo. Ils ont, eux, écopé de quinze et cinq ans de prison. L’ancien policier Eduardo Ruffo, poursuivi dans ce même volet, a été acquitté.

Cris de joie

Le verdict a été accueilli avec des cris de joie, des chants et des larmes sur le parvis du tribunal où des centaines de personnes ont suivi sur un écran géant la lecture de la décision.

Le verdict a été accueilli avec des cris de joie, des chants et des larmes sur le parvis du tribunal où des centaines de personnes ont suivi sur un écran géant la lecture de la décision. Présente dans la salle d’audience, Estela de Carlotto, dirigeante de l’organisation des Grands-Mères de la Place de Mai, à l’origine de la découverte de l’identité de 105 enfants volés, s’est réjouie d’une décision qui "confirme qu’il y a eu en Argentine un plan systématique de vol de bébés". Son organisation évalue à environ 500 le nombre de "bébés volés" puis "adoptés" sous une fausse identité sous la dictature.

Au pouvoir de 1976 à 1981, Jorge Videla purge déjà deux peines de prison à perpétuité pour crime contre l’humanité. Reynaldo Bignone (1982-1983) purge également deux peines (perpétuité et vingt-cinq ans de prison), pour violation des droits de l’homme. "Toutes celles qui ont accouché, que je respecte en tant que mères, étaient des militantes actives de la machinerie du terrorisme. Elles ont utilisé leurs enfants comme boucliers humains", avait affirmé Jorge Videla la semaine dernière à l’audience.

Le plus souvent, le bébé né en détention était remis à un militaire ou à un proche d’un militaire, tandis que sa mère était peu de temps après jetée à la mer, nue et vivante, d’un avion militaire en plein vol. Quelque 30 000 opposants ont été tués ou portés disparus sous le régime militaire argentin, selon les organisations de défense de droits de l’homme.

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