Des activistes anti-sida expulsés lors du Forum économique mondial

Plus de 3,7 millions d’Africains ayant besoin d’ARV n’y ont pas accès

Publié le 11 mai 2010 sur OSIBouaké.org

Nairobi, 10 mai 2010 - PlusNews - Le gouvernement tanzanien a expulsé plusieurs activistes de la lutte contre le sida   et annulé une manifestation de protestation contre la baisse des financements alloués aux politiques VIH   lors du Forum économique mondial (FEM) à Dar es Salaam, la capitale commerciale.

« Nous avons rencontré Yvonne Chaka Chaka [chanteuse sud-africaine et activiste de la lutte contre le sida  ] et nous lui avons donné notre mémorandum à présenter aux leaders participant au FEM ; peu après, nous avons été arrêtés », a dit à IRIN/PlusNews Bactrin Killingo, de l’International Treatment Preparedness Coalition (ITPC).

« Nous avons passé quatre ou cinq heures à faire des dépositions au poste de police, après quoi nous avons été escortés à nos hôtels pour prendre nos affaires, puis à l’aéroport, où nous avons été expulsés ». Aucune accusation n’a été retenue contre les activistes, qui étaient originaires de différents pays africains.

L’annonce d’une grève par le syndicat national des travailleurs a incité le président tanzanien Jakaya Kiwete à annuler toutes les manifestations cette semaine. « Nous avions reçu l’autorisation d’organiser la manifestation [le 5 mai], mais plus tard, nous avons reçu une lettre annulant [cette autorisation]… Seuls 10 d’entre nous ont remis le mémorandum – ce n’était pas une manifestation », a dit M. Killingo.

Les personnes arrêtées étaient notamment : Paula Akugizibwe et Lynette Mabote d’AIDS and Rights Alliance for Southern Africa ; James Kayo et Netsayi Dzinoreva de l’ITPC ; Linda Mafu et Soraya Matthews de la Campagne mondiale contre le sida   ; Sydney Hushie de la Global Youth Coalition on HIV/AIDS ; et Michael O’Connor, du Fonds mondial de lutte contre le sida  , la tuberculose et le paludisme.

Dans un communiqué, les activistes ont accusé les autorités tanzaniennes de faire preuve d’un « mépris total du droit à la liberté d’expression [de personnes souhaitant délivrer] un message aussi [important] que celui-ci ».

Les officiels du gouvernement tanzanien n’étaient pas disponibles pour commenter l’affaire.

Baisse des financements

D’après un rapport récemment publié par l’ITPC, intitulé Missing the Target (Cible manquée) [1], plusieurs pays africains – dont la République démocratique du Congo, le Mozambique, l’Afrique du Sud, l’Ouganda et la Zambie – ont indiqué que leurs programmes gouvernementaux de traitements antirétroviraux (ARV  ) refusaient des patients à cause de réductions des financements nationaux et extérieurs.

« Nous constatons une baisse des financements provenant de grands bailleurs tels que le PEPFAR   [le Plan d’urgence du président américain pour la lutte contre le sida  ] ; nous avons également observé une réduction des contributions gouvernementales au Fonds mondial [de lutte contre le sida  , la tuberculose et le paludisme] », a dit à IRIN/PlusNews Catherine Tomlinson, chercheuse principale pour le groupe d’activistes sud-africain Treatment Action Campaign.

« Nous avons posé les bases de l’accès universel [à la prévention, au traitement et aux soins VIH  ] ; aujourd’hui est venu le moment où l’on revient sur les promesses de financement, et où l’on remet en cause toutes les avancées que nous avons faites ».

Ces cinq dernières années, on estime que le nombre de personnes sous ARV   – un traitement qui prolonge la vie des patients –, a été multiplié par 10 ; environ 2 925 000 Africains étaient sous ARV   à la fin de l’année 2008, d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS  ).

Les activistes ont également demandé que les gouvernements africains respectent une promesse faite en 2001 au Sommet de l’Union africaine à Abuja, capitale du Nigeria, par laquelle ils s’étaient engagés à allouer 15 pour cent de leurs budgets nationaux à la santé.

« Où est cet argent ? », a demandé James Kamau, coordinateur du Kenya treatment Access Movement, à une conférence de presse à Dar es Salaam, le 4 mai. « Les véritables erreurs colossales sont les habitudes de gaspillage de nombreux gouvernements, qui donnent la priorité aux guerres, aux [conditions de vie] luxueuses des hommes politiques et au sport plutôt qu’aux dépenses sociales ».

Les activistes ont demandé aux leaders présents au Forum économique mondial sur l’Afrique d’élaborer un plan d’action clair et soumis à des délais afin de réaliser l’objectif d’Abuja, et ont appelé le G8 et le G20, groupes rassemblant des pays développés et émergents, à remplir les caisses du Fonds mondial.

Ils ont également appelé le président américain Barack Obama à garantir que le PEPFAR   soutienne la prise en charge de nouveaux patients par les programmes de traitement.

imprimer

retour au site


[1] rapport téléchargeable en fin d’article