Besoin de fonds plus importants contre le VIH

Publié le 15 mars 2010 sur OSIBouaké.org

Kristin Palitza, Le Cap, 15 mars (IPS) - La diminution ou le plafonnement du financement du VIH   déstabilisera les systèmes de santé des pays en développement, a annoncé un groupe d’organisations non gouvernementales (ONG).

Ce groupe exige que les gouvernements du monde entier tiennent leur promesse de réaliser l’accès universel au traitement du VIH  .

La Campagne d’action pour un traitement (TAC), l’Alliance de lutte contre le SIDA   et de défense des droits en Afrique australe (ARASA) et Médecins sans frontières (MSF  ) ont exprimé leur inquiétude sur la baisse de l’engagement à financer les programmes de lutte contre le VIH   dans les pays pauvres.

Ils ont fait savoir leurs préoccupations à la veille d’une réunion de haut niveau le 9 mars au Royaume-Uni. Cette réunion pourrait déterminer si le G20 – le Groupe des vingt ministres des Finances et gouverneurs de banque centrale créé en 1999 pour stabiliser le marché financier mondial - respectera un engagement de 2005 pour renforcer le traitement du VIH  .

Il y a cinq ans, le G8, le groupe des huit dirigeants politiques les plus puissants du monde, s’est engagé à réaliser l’accès universel d’ici à 2010, une décision qui a été décrite à l’époque comme marquant un "moment historique". "Mais maintenant, cela est devenu une déception historique, parce qu’il nous reste plus de la moitié du chemin pour parvenir à ces objectifs", a déclaré Paula Akugizibwe, la coordinatrice du plaidoyer de l’ARASA.

"Les bailleurs de fonds semblent avoir jeté l’éponge et ils ont commencé à détourner leur attention, alors que 10 millions de personnes ont encore besoin de l’accès au traitement [dans le monde]", a-t-elle ajouté. "Cela a entraîné la déception et l’inquiétude".

La plupart des pays africains dépendent de financements extérieurs pour soutenir leurs programmes nationaux de traitement du VIH  , mais les principaux bailleurs de fonds, tels que le Plan d’urgence du président américain pour la lutte contre le SIDA  , n’ont pas augmenté leur financement au cours des dernières années, ont indiqué les représentants des trois ONG.

Ils étaient également préoccupés par le changement des priorités des donateurs qui ont rendu incertain l’appui au Fonds mondial de lutte contre le VIH  /SIDA  , la tuberculose (TB) et le paludisme, qui jusqu’à présent a payé pour les deux tiers des personnes qui sont sous le traitement du VIH   dans le monde entier.

"Il y a cinq ans, les pays du G8 ont fixé ces objectifs. Pourquoi détournent-ils soudainement leur attention ?", a demandé Akugizibwe. "Le vrai problème, c’est l’argent. Le traitement du VIH   est coûteux. C’est pourquoi les gouvernements font marche arrière".

Certains politiciens avancent que le VIH   a reçu une somme d’argent disproportionnée au cours des années par rapport à d’autres maladies. D’autres en revanche estiment que trop d’argent va vers le traitement du VIH   et que l’argent qui va vers la prévention n’est pas suffisant.

Mais les militants pour la lutte contre le SIDA   soulignent le fait que le VIH   ne peut pas être dissocié des autres besoins de santé. "La dernière décennie de l’augmentation du financement du VIH   a montré que le traitement marche. Nous avons constaté une baisse de l’infection à VIH   et une réduction de la mortalité infantile et générale. Nous avons réduit les cas de tuberculose et amélioré la santé maternelle et infantile", a indiqué Gilles Van Cutsem, coordinateur du centre de traitement du VIH  /TB de MSF   à Khayelitsha.

Il a également souligné l’impact positif que le traitement du VIH   a eu sur les Objectifs du millénaire pour le développement. "Des recherches ont montré qu’une baisse de un pour cent de la prévalence du VIH   équivaut à une augmentation de 80 pour cent du produit intérieur brut ou à huit années de croissance économique", a expliqué Van Cutsem.

En dehors de cela, la diminution du financement est susceptible de conduire à une crise sanitaire majeure. "Le manque de financement entraînera des pénuries de médicaments, ce qui interrompra le traitement et entraînera une augmentation de la résistance aux médicaments. Cela rendra le VIH   beaucoup plus difficile à traiter", a prévenu Van Cutsem. "Cela conduira également à un accès plus lent au traitement".

Les militants ont annoncé que le retrait du financement du traitement du VIH   finira par déstabiliser les systèmes de santé dans les pays en développement. "Les gouvernements et les donateurs doivent poursuivre ce qu’ils ont commencé", a exigé Van Cutsem. "Toute chose en moins entraînera des programmes de mauvaise qualité et un gaspillage de l’investissement initial. Un financement plat ou réduit n’est pas assez bon".

Andile Madondile, l’éducateur pour le VIH   de la TAC, a renchéri en notant qu’une réduction du financement aura des effets préjudiciables sur les quatre millions de personnes qui reçoivent actuellement le traitement. "Nous ne devons pas défaire ce progrès", a-t-il indiqué.

Madondile a en outre expliqué que l’indisponibilité de traitement est susceptible d’avoir un impact négatif sur la prévention. Par exemple le nombre de personnes ayant accès aux conseils et dépistage volontaires : "Sept personnes sur dix ont d’urgence besoin d’un traitement en Afrique du Sud, mais si un traitement ne peut pas être garanti, il sera difficile de motiver d’autres à faire le test de dépistage".

Outre le fait de tenir le G8 responsable de son engagement à réaliser l’accès universel, les activistes ont également souligné la responsabilité des pays africains à lutter contre le VIH  , par exemple en soutenant la Déclaration d’Abuja sur le VIH  /SIDA  , la TB et d’autres maladies infectieuses connexes, qui a été signée en avril 2001 par les chefs d’Etat de l’Union africaine au Nigeria. Dans le cadre de cette déclaration, les chefs d’Etat ont promis d’allouer au moins 15 pour cent de leurs budgets nationaux annuels au secteur de la santé.

"[Sur 53 pays africains], seulement 16 dépensent plus de dix pour cent de leurs budgets sur la santé comme promis", s’est plaint Akugizibwe. "Il s’agit plus de rhétorique que d’engagements de ressources. Nous avons besoin de voir plus de responsabilité et d’efficacité dans la région".

Nokhwezi Hoboyi, coordinateur de la TAC pour le district de Ekurhuleni, a appelé à un leadership politique plus fort dans la lutte contre le VIH   : "Nous avons besoin de niveaux d’investissement plus élevés dans la santé et de plus de transparence. Mais cela ne peut se faire sans un leadership plus fort".

Selon le Fonds mondial, il faudra 20 milliards de dollars au cours des trois prochaines années pour soutenir les programmes de lutte contre le VIH  , la TB et le paludisme existants et permettre une légère augmentation proportionnelle de ces programmes. Le fonds est actuellement confronté à un déficit budgétaire d’au moins 4 milliards de dollars.

"Nous demandons que le Fonds mondial soit réapprovisionné. Toute autre chose entraînerait une régression tragique", a déclaré Akugizibwe

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