La répression de l’homosexualité renforce la clandestinité

IRIN/PlusNews a dressé une liste rapide de cas de violation des droits humains à l’encontre des homosexuels africains

Publié le 27 janvier 2010 sur OSIBouaké.org

Johannesburg, 20 janvier 2010 (PLUSNEWS) - Plus de deux tiers des pays africains disposent d’une législation réprimant les actes homosexuels. Bien qu’ils représentent un pourcentage significatif de nouvelles infections dans de nombreux pays, les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes tendent à être exclus des initiatives de lutte contre le VIH  .

« [Ils] vivent dans la clandestinité ; ils se cachent et continuent à alimenter l’épidémie », a récemment expliqué à IRIN/PlusNews Michel Sidibé, directeur exécutif du Programme commun des Nations Unies sur le sida  , ONUSIDA  . « Nous devons nous assurer que ces groupes vulnérables bénéficient des mêmes droits que tout un chacun : un accès aux informations, aux soins et à la prévention, pour eux et leurs familles ».

IRIN/PlusNews a dressé une liste rapide de cas de violation des droits humains à l’encontre des homosexuels africains.

Malawi - Le 28 décembre 2009, peu de temps après une cérémonie de fiançailles traditionnelle, Steven Monjeza et Tiwonge Chimbalanga ont été arrêtés et accusés de « crime contre-nature » et de « pratiques indécentes entre personnes de sexe masculin », deux condamnations respectivement assorties d’une peine maximale de 14 ans et cinq ans d’emprisonnement.

Bien que les deux hommes nient avoir eu des relations sexuelles, le procureur a demandé à ce qu’ils soient examinés à l’hôpital afin que leur rapport intime puisse être démontré. Selon les activistes et leurs avocats, cette requête constituerait une violation de leur droit constitutionnel à la dignité. Le procès a été reporté au 25 janvier 2010.

Ouganda - En octobre 2009, David Bahati, représentant parlementaire du parti de la majorité, a soumis un projet de loi anti-homosexualité (2009), d’initiative parlementaire. Celui-ci suggère notamment d’instaurer la peine de mort pour le crime d’« homosexualité aggravée », qui s’applique lorsqu’une personne séropositive a des relations homosexuelles avec une personne handicapée ou âgée de moins de 18 ans.

L’homosexualité est illégale en Ouganda et passible d’une peine maximale de réclusion criminelle à perpétuité.

Les acteurs de la lutte contre le sida   et les groupes de défense des droits humains ont vivement contesté la loi, estimant qu’elle constituait une violation de la vie privée des homosexuels. Cédant à la pression exercée par plusieurs leaders internationaux, le président Yoweri Museveni a pris ses distances par rapport à cette loi, réduisant ainsi les possibilités qu’elle soit entérinée en l’état.

Néanmoins, un tabloïde local, The Red Pepper, publie de façon régulière des listes d’homosexuels ougandais présumés.

Tanzanie - En mai 2009, un journal local, Ijumaa, a publié une photographie de deux hommes dans un lit avec le titre suivant, « Caught Live ! » (Pris en flagrant délit !). Un rapport rédigé par plusieurs groupes de défense des droits des homosexuels souligne que l’article qui accompagne la photo emploie des termes dégradants et discriminatoires à l’égard des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes.

Un reporter de Ijumaa, accompagné par trois policiers, avait suivi les hommes dans la rue jusqu’à un hôtel privé. Ils ont ensuite fait intrusion dans la chambre et pris les photographies qui sont parues dans le journal.

D’après la International Gay and Lesbian Human Rights Commission, plus de 40 militants gays et lesbiennes ont été arrêtés pour débauche en Tanzanie au cours de l’année 2009.

Burundi - En avril 2009, le président Pierre Nkurunziza a adopté une proposition de loi réprimant l’homosexualité pour la première fois dans l’histoire du Burundi. Toute personne jugée coupable d’activité homosexuelle est passible d’une peine d’emprisonnement de deux à trois ans, et d’une amende maximale de 80 dollars.

Paradoxalement, dans d’autres articles de cette même législation, des mesures sont prises pour protéger les droits humains, notamment l’abolition de la peine de mort et la reconnaissance de l’illégalité de la torture, des génocides, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.

Sénégal - En décembre 2008, le gouvernement sénégalais a arrêté neuf hommes accusés d’avoir fourni des services de prévention, de soins et de traitement du VIH   à la communauté lesbienne, gay, bisexuelle et transsexuelle du pays.

Les hommes ont ensuite été condamnés à huit ans de prison pour « appartenance à une organisation criminelle et participation à des actes contre nature », mais la cour d’appel a infirmé ce verdict en avril 2009.

Les arrestations pour activité homosexuelle sont monnaie courante au Sénégal ; en août 2008, à Dakar, deux hommes ont été arrêtés à leur domicile et accusés de « mariage homosexuel » et d’actes contre-nature. Selon des groupes de défense des droits humains, 30 hommes au total ont été arrêtés pour homosexualité en 2009.

Egypte - En mai 2008, un tribunal de la capitale égyptienne, Le Caire, a condamné cinq hommes séropositifs pour « pratique habituelle de débauche », un chef d’accusation qui comprend les actes sexuels consensuels entre hommes.

Ces condamnations se sont inscrites dans le cadre d’une campagne de répression menée à l’encontre des personnes vivant avec le VIH  /SIDA  , et qui a conduit à l’arrestation de 12 hommes soupçonnés d’être séropositifs ; au cours de leur garde à vue, ils ont été soumis à des tests de dépistage du VIH   et à des examens proctologiques visant à déterminer s’ils avaient eu des relations sexuelles avec d’autres hommes. Un peu plus tôt, en janvier 2008, quatre hommes séropositifs ont été condamnés à un an de prison pour débauche.

Gambie - En mai 2008, le président gambien Yahya Jammeh a donné aux homosexuels un délai de 24 heures pour quitter le pays. Il s’est engagé à adopter des lois contre les pratiques homosexuelles plus strictes qu’en Iran, et a menacé de décapiter tous les homosexuels arrêtés sur le territoire national.

Les déclarations de M. Jammeh feraient suite à un certain nombre de cas d’immigration de gays sénégalais, ayant traversé la frontière gambienne pour fuir les persécutions dans leur propre pays.

Afrique du Sud - En avril 2008, Eudy Simelane, star de l’équipe nationale de football féminin d’Afrique du Sud, Banyana Banyana, qui assumait ouvertement son homosexualité, a été retrouvée assassinée dans un parc situé en périphérie de Johannesbourg. Elle avait subi un viol collectif et avait été brutalement battue avant d’être poignardée à mort.

Selon les défenseurs des droits humains, l’agression relève très certainement d’un « viol correctif », une pratique selon laquelle des hommes violent les femmes lesbiennes en prétextant tenter de les « guérir » de leur orientation sexuelle.

Depuis, une série d’agressions similaires ont été perpétrées à l’encontre des femmes lesbiennes dans le pays, mais peu ont été portées devant la justice. D’après un rapport de 2009 rédigé par l’ONG ActionAid, 31 meurtres de femmes lesbiennes ont été enregistrés depuis 1998. Parmi ces cas, seuls trois ont été portés devant la justice, et un a donné lieu à une condamnation.

Cameroun - En janvier 2008, un tribunal camerounais a condamné trois hommes accusés d’homosexualité à six mois de travail forcé. Les actes homosexuels sont passibles d’une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement, souvent appliquée à l’encontre des gays.

Bien que le code pénal n’octroie à l’Etat le droit de traduire les citoyens en justice qu’en cas de flagrant délit, les personnes soupçonnées d’homosexualité sont souvent arrêtées dans des restaurants et bars publics, selon les groupes de défense.

Nigeria - En août 2007, 18 hommes - tous présumés travestis - ont été arrêtés dans l’état de Bauchi, un état majoritairement musulman situé dans le nord du pays ; d’abord accusés de sodomie, ils ont finalement été jugés pour vagabondage ou oisiveté. Les hommes ont finalement été relâchés sous caution, mais l’affaire était toujours en cours en mars 2009.

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