Devant le Tribunal spécial, Charles Taylor se présente comme un homme de paix

Publié le 14 juillet 2009 sur OSIBouaké.org

Compte rendu | Le Monde | 14.07.09 | 15h15 | Stéphanie Maupas | Correspondante à La Haye

Courtenay Griffiths a plaidé avec passion l’innocence de Charles Taylor devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), lundi 13 juillet, à La Haye. Accusé de crimes contre l’humanité et crimes de guerre, l’ex-président du Liberia est devenu, dans ses mots, un homme de paix.

Depuis le début du procès, en juin 2007, le procureur a appelé 91 témoins à la barre. Ils ont raconté comment Charles Taylor a pillé les richesses diamantifères de la Sierra Leone, après s’être emparé du pouvoir par les armes au Liberia, au début des années 1990.

Jusqu’ici silencieux, l’ancien chef d’Etat doit témoigner au cours des cinq prochaines semaines. Il promet de raconter sa "révolution", commencée dans les camps d’entraînement libyens, dans les années 1980. Une révolution que le procureur appelle "terrorisme". Depuis le Liberia, Charles Taylor s’engage ensuite dans la guerre civile de Sierra Leone, (1991-2002). Selon le procureur, il forme, entraîne et arme les rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF), en échange de diamants. Cette guerre civile a fait près de 150 000 morts et des dizaines de milliers d’amputés.

Négations en bloc

"Nous n’avons jamais nié que de terribles atrocités ont eu lieu en Sierra Leone, tonne l’avocat britannique, presque furieux, à l’adresse du procureur Stephen Rapp, qui a présenté à la barre de nombreuses victimes. Mais les enfants soldats ne sont pas une invention de Charles Taylor." S’il figure aujourd’hui dans le box des accusés, c’est du fait du dépit des puissances occidentales qui, argue-t-il, n’ont jamais reconnu les indépendances africaines.

L’acte d’accusation dressé contre l’ex-chef de guerre n’est qu’une forme de néocolonialisme, plaide en substance Me Griffiths, qui tente d’introduire des nuances dans le portrait manichéen dressé par les "médias occidentaux". Charles Taylor a aussi inspiré Hollywood avec les films Blood Diamonds et Lord of War. Mais "s’il s’est impliqué en Sierra Leone, c’est pour la paix", affirme l’avocat.

Arrêté comme "un immigrant illégal" au printemps 2006, après trois années d’exil connu à Calabar, au Nigeria, son acte d’accusation a "pavé la voie à Ellen Johnson Sirleaf", l’actuelle présidente du Liberia, élue en 2006 avec le soutien des Etats-Unis. Au cours des prochaines semaines, Charles Taylor abandonnera sa raquette de tennis, sport auquel il s’adonne dans la cour de la prison de Scheveningen (Pays-Bas). Il "niera tout contrôle sur le RUF". L’avocat lance à demi-mot ses contre-accusations. "Qui sont les auteurs de ces atrocités ?", interroge-t-il. Charles Taylor expliquera "comment les occidentaux refusaient d’investir dans le pays, mais envoyaient des groupes de mercenaires qui, en soutenant le gouvernement en place, étaient payés en diamants".

Courtenay Griffiths affirme cependant que Charles Taylor n’est pas "désespéré" au point de tout révéler. "Imaginez-vous que s’il était jugé, George Bush révélerait tous les secrets de la CIA ?" Dans les prochains mois, il promet de conduire à la barre 249 témoins en faveur de M. Taylor, parmi lesquels des responsables des Nations unies, des vendeurs de diamants et d’anciens chefs d’Etat africains.


A La Haye, Charles Taylor réfute les accusations portées contre lui

Lemonde.fr avec AFP | 14.07.09 | 14h00

Charles Taylor, l’ex-président du Liberia clame, mardi 14 juillet, son innocence devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) à La Haye. Il nie avoir reçu des diamants en échange d’armes des rebelles sierra-léonais qu’il est accusé d’avoir dirigé en sous-main. "Il n’y a pas un seul être humain qui pourrait croire qu’il est vrai que j’ai fait des affaires avec le RUF, recevant des diamants en échange d’armes ou recevant des diamants en échange de quoi que ce soit", a affirmé M. Taylor, qui a commencé à témoigner mardi. L’ancien chef de guerre, qui plaide non coupable, est le premier témoin cité par la défense, qui avait commencé lundi à présenter ses arguments au tribunal.

Selon l’accusation, M. Taylor dirigeait en sous-main les rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF) qui ont mis à feu et à sang la Sierra Leone, leur fournissant armes et munitions en échange d’un accès aux ressources, notamment en diamants et bois précieux, de ce pays voisin du Liberia.

M. Taylor, élu président du Liberia en 1997, répond depuis janvier 2008 de onze crimes de guerre et crimes contre l’humanité, notamment meurtre, viol et enrôlement d’enfants soldats, commis durant la guerre civile en Sierra Leone qui a fait 120 000 morts et des milliers de mutilés entre 1991 et 2001.


Photos : Charles Taylor, le 13 juillet 2009 à La Haye (c) AP/ROBIN VAN LONKHUIJSEN / Charles Taylor répond depuis janvier 2008 de onze crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis durant la guerre civile en Sierra Leone qui a fait 120 000 morts et des milliers de mutilés entre 1991 et 2001.

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