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« Moins de 10% des enfants roms vivant en France sont scolarisés »



Libération - Société - 05/11/2009 - 14h53 - Interview par Justine Lafon

Le tout nouveau collectif pour le droit des enfants roms à l’éducation lance un « appel national » à la scolarisation des enfants roms. Entretien avec Michel Fèvre, président de Romeurope 94 et membre de la LDH.

A deux semaines du 20ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, un « appel national » à la scolarisation des enfants roms vivant en France a été lancé, hier mercredi, par le Collectif pour le droit des enfants roms à l’éducation. Ce dernier, qui vient d’être créé, réunit 13 organisations – en plus du collectif Romeurope déjà existant – dont le principal syndicat de l’enseignement primaire SNUipp-FSU, la FCPE ou RESF.

Michel Fèvre, président de Romeurope 94 et membre de la LDH, explique en quoi la scolarisation des Roms est un enjeu pour la société.

A quels objectifs répond la création d’un collectif pour le droit des enfants roms à l’éducation ?

C’est une initiative de Romeurope pour aider ces milliers d’enfants roms vivant en France, majoritairement roumains et dans une moindre mesure originaire de Bulgarie ou d’ex-Yougoslavie. Beaucoup n’ont pas accès à l’école. L’enjeu est de passer de la dénonciation à la mobilisation.

Combien y a-t-il d’enfants roms qui n’ont pas accès à l’école en France ?

En France, on dénombre entre 5 et 7.000 enfants roms, âgés de 6 à 16 ans, et pami eux, moins de 10% sont scolarisés. Après en terme de répartition, cela dépend des communes. A Marseille, par exemple, sur 600 enfants roms de 6 à 16 ans, seuls 50 ont été inscrits à l’école au cours de l’année 2008-2009 et environ 20 étaient effectivement scolarisés en fin d’année. Dans certaines collectivités territoriales, aucun enfant roms n’est scolarisé alors que dans d’autres, on observe une scolarisation complète. C’est bien la preuve que des solutions existent.

Quels sont les facteurs de cette non-scolarisation ? Le premier blocage est administratif. Pour s’incrire leurs enfants à l’école, les parents doivent s’adresser à la mairie qui demande généralement un justificatif de domicile. Or, il est très difficile pour les populations Roms d’obtenir ce type de document.

Les conditions de vie des Roms ne facilitent pas non plus l’accès à l’école. La précarité mais aussi les expulsions à répétition, parfois cinq à six fois en trois mois, découragent les familles. Après une expulsion, tout est à refaire.

Et les conséquences ? C’est un véritable gâchis humain. Des enfants qui n’ont pas accès aux apprentissages de base et à la culture commune deviennent des adultes exclus. C’est une situation qui va créer des dégâts dans 10 ou 15 ans car la société sera face à des personnes qui n’ont jamais eu accès à une formation.

Que comptez-vous faire ? Notre démarche consiste d’abord à renforcer les collectifs locaux. Il faut agir au niveau des collectivités territoriales car ce sont elles qui peuvent aider ces enfants, en accordant une aide pour la cantine ou en mettant en place des transports scolaires à proximité de leurs lieux de vie par exemple. Surtout qu’aujourd’hui, beaucoup de municipalités se rendent compte que les expulsions ne règlent pas le problème.

Ensuite, on espère rencontrer Luc Chatel, le ministre de l’Education nationale, car la précèdente rencontre du collectif Romeurope avec le ministère - lorsque Xavier Darcos était ministre - n’a pas été concluante. A ce moment là, on nous avait signifié que si les Roms n’allaient pas à l’école c’était peut être par manque d’envie. Or, ce n’est pas le cas. Les familles roms sont conscientes de l’importance de la scolarisation. De plus, la France a pris des engagements en ratifiant en 1990 la Convention internationale des droits de l’enfant, elle doit les tenir. Les enfants roms doivent être aidés au même titre que les autres.


Publié sur OSI Bouaké le dimanche 8 novembre 2009

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