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Dossier spécial Humanitaire dans le numéro de septembre 2008 du Monde Diplomatique


Mots-Clés / Humanitaire

Depuis qu’est invoqué le « droit d’ingérence » et que les armées ont investi le champ de l’humanitaire, la confusion des genres crée un facteur de risques pour les organisations non gouvernementales (ONG) et, surtout, pour leurs personnels locaux. La figure compassionnelle de la victime ne doit pas masquer le caractère profondément politique de ces engagements, fussent-ils « désintéressés », ni leur impact sur le fonctionnement des sociétés locales.

Sommaire

  • Une morale très politique par Bernard Hours
  • A Kinshasa, aventuriers africains et professionnels occidentaux par Michel Galy
  • Sur fond d’indignation et de pétrole, tout a commencé au Biafra par Pierre Micheletti
  • Droit d’ingérence, où en est-on ? par Caroline Fleuriot

Aperçu d’un article

Derrière les évidences humanitaires

Une morale très politique

Par Bernard Hours

Au mépris des conventions de Genève, l’armée colombienne a, le 2 juillet, utilisé l’emblème de la Croix-Rouge afin de libérer quinze otages des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). A Kaboul, l’International Rescue Committee (IRC), qui employait trois volontaires tués le 13 août, a annoncé la suspension de ses activités en Afghanistan. Le temps n’est plus où, avant la guerre du Biafra, en 1967, l’aide d’urgence affichait sa neutralité (lire « Sur fond d’indignation et de pétrole, tout a commencé au Biafra »). Depuis qu’est invoqué le « droit d’ingérence » et que les armées ont investi le champ de l’humanitaire, la confusion des genres crée un facteur de risques pour les organisations non gouvernementales (ONG) et, surtout, leurs personnels locaux. La figure compassionnelle de la victime ne doit pas masquer le caractère profondément politique de ces engagements, fussent-ils « désintéressés », ni leur impact sur le fonctionnement des sociétés locales, comme au Congo (lire « A Kinshasa, aventuriers africains et professionnels occidentaux »).

Il fallut attendre les inévitables dérives, rançon du succès de l’humanitaire, pour que ses objectifs et même sa moralité soient exposés aux soupçons. Ainsi, les mésaventures de L’Arche de Zoé au Tchad, début 2008 (lire « Zoé, l’onde de choc »), ont fait l’objet d’une couverture médiatique critique là où, auparavant, on aurait seulement évoqué ses « bonnes intentions ». Déjà, lors du tsunami en Asie du Sud-Est en 2004, la capacité des organisations non gouvernementales (ONG) à gérer les importants dons reçus avait été mise en cause.

L’action humanitaire repose sur un ensemble cohérent de pratiques et de principes qui, présentés comme nécessaires et moraux, constituent une idéologie. Cette grille de lecture du monde repose sur trois piliers qui méritent examen : l’universalité des droits de l’homme, affirmation aussi sympathique que problématique ; la construction de la figure de la victime, sans laquelle il n’y a pas de sauvetage possible ; l’ingérence comme droit d’accès non négocié aux victimes.

L’universalité des droits de l’homme est un postulat sans lequel il n’y a pas d’action humanitaire légitime. Mais quelle est la nature du sujet porteur de ces droits déclinés dans des secteurs tels que la santé, l’éducation ou la sécurité ? Ce n’est pas celui de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui était un sujet politique, mais un exemplaire de l’espèce, un corps biologique dont l’existence doit être sauvée de la famine, d’une épidémie ou d’une catastrophe naturelle. C’est la cible de la médecine d’urgence dont Médecins sans frontières (MSF  ) incarne un symbole planétaire. Le droit à la vie est un produit du XXe siècle tardif et de l’âge humanitaire, qui commence avec la Croix-Rouge, mais se structure au cours des années 1980, dans un contexte de dépolitisation et de moralisation générales.

On peut d’ailleurs se demander dans quelles proportions le corps de la victime est un sujet ou un objet. Sa dignité est abstraite, relativisée par les circonstances (camps de réfugiés, par exemple). Etre un homme est encore un statut ; (...)

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Publié sur OSI Bouaké le jeudi 28 août 2008



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